Objets
inanimés avez-vous une âme, vous qui êtes
les témoins privilégiés de la vie des hommes
et qui traversez parfois les siècles ?
Chantal Malignon, comédienne,
auteur dramatique et romancière, explore, entre autres,
cette déclinaison lamartinienne de la mémoire
dans un roman éblouissant "Mémoires
d'un lit".
Un roman écrit à la première personne
du singulier par un narrateur singulier, un lit, et comme l'homme
passe au moins un tiers de son temps à dormir, ce témoin
muet doué de conscience a bien des choses à découvrir
et à raconter.
Sans verser dans l'anthropomorphisme lénifiant ou ésotérique,
Chantal Malignon donne la parole, ou plutôt la plume,
à ce lit doté d'une conscience aigue de ce qui
l'entoure, et qui va connaître un destin picaresque, pour
évoquer les destins croisés, les amours défuntes
et les secrets de la vie.
Sans verser dans l'anthropomorphisme lénifiant ou ésotérique,
Chantal Malignon donne la parole, ou plutôt la plume,
à ce lit doté d'une conscience aigue de ce qui
l'entoure et d'une forte personnalité au point de manfester
sa présence et vouloir influer sur les rêves de
ses dormeurs, et qui va connaître un destin mouvementé
après des débuts picaresques, pour évoquer
les destins croisés, les amours défuntes et les
secrets de la vie.
Son histoire commence de manière brutale, dans l'Espagne
rouge et noire, par l'assassinat d'un chêne dans la jeunesse
de son âge, qui heureusement ne connaîtra pas le
triste sort du grand chêne de Brassens, avant la mise
au monde par un rude ébéniste qui lui fera connaître
les premières étreintes tumultueuses qui animent
les humains.
Car l'amour est au centre de ce lumineux roman au verbe poétique
et romanesque, qui sait se colorer pour décrire l'exultation
des corps et comporte des pages d'une éblouissante beauté,
l'amour ce grand mystère que le lit cherche à
comprendre au gré de ses occupants successifs.
Il y aura la première, l'unique, l'évanescente
et envoûtante Alicia, la douce qui lui apprit le français
en lisant des romans à haute voix, les ruades de Pounette
dans la France de mai 68 qui se révolte contre la vie
de pauvre, la langueur d'Albert le jeune fils de bourgeois qui
cacha dans son matelas sa trompette symbole d'un rêve
abandonné, les amours plurielles de Mireille pour oublier
un amour impossible.
Et puis le dévoilement avec Jules et Marceline : "La
révélation, l'amour, le vrai, le grand m'était
offert par ces deux vieux. L'amour venait de loin se jeter dans
les yeux de l'autre et repartait grandi, se refléter
partout". |