En
juin 2008, les spectateurs du Théâtre Clavel pouvaient
découvrir un spectacle atypique basé sur des variations
performatives.
Faisant intervenir plusieurs disciplines dans un concept d'oeuvre
d'art totale, et "Corps étrangers"
conçu et mis en scène par Lisa
Guédy ressortit tant de la cérémonie
secrète que de la fable onirique.
Sa reprise au Vingtième Théâtre du 6 au
24 mai 2009, une reprise à ne pas rater, nous donne l'occasion
d'en savoir plus sur Lisa Guédy qui, malgré un
emploi du temps très serré en raison des répétitions,
a bien voulu répondre par mail à quelques questions.
Le spectacle "Corps étrangers" que vous avez
conçu et mis en scène et qui est l'affiche du
20ème Théâtre après avoir été
à celui du Théâtre Clavel en juin 2008,
est un spectacle atypique notamment en ce que les comédiens
sont sur scène et dans les airs et qui suppose que vous
avez eu une formation spécifique qui n'est pas qu'une
formation de comédienne
Lisa Guédy : J’ai en effet commencé très
jeune par faire du théâtre de rue avec mon père,
j’ai ensuite continué adolescente en tournant des
courts-métrages et en faisant une école de théâtre
plus “classique”, et lors d’un stage dans
une école de cirque dans l’idée de devenir
voltigeuse à cheval, je me suis découverte assez
souple pour gagner ma vie en exerçant le métier
de contorsionniste, ce que j’ai fait durant une dizaine
d’années, avant d’écrire façon
“cut-up” les spectacles que je mets dorénavant
en scène aujourd’hui.
C’est peut-être ça qui donne ce petit coté
“atypique”…
Quelle est la genèse et le propos de ce spectacle ?
Lisa Guédy : Le spectacle parle du rapport
du modèle au créateur, en ce que le modèle
par sa particularité, son “étrangeté”,
insuffle à l’oeuvre créée. C’est
à dire ce qui fait la magie d’une rencontre, entre
la personne qui va inspirer l’oeuvre et celui qui va la
réaliser, comme on peut imaginer que l’a été
la rencontre entre Lewis Carroll et l’enfant qu’était
Alice Lidell et qui lui a inspiré l’histoire d’
”Alice au pays des merveilles””, et qui dit
qu’en dehors de toutes les ambiguités, scandales,
et incompréhensions que soulève une oeuvre d’art,
sa seule raison d’être est cette histoire d’amour
absolue qui en est le point de départ et son seul réél
charme. L’amour rend aveugle, mais si cela permet de voir
la réalité autrement c’est peut-être
préférable.
Quelles sont les difficultés et les contraintes générées
par ce spectacle notamment pour sa programmation ?
Lisa Guédy : C’est un spectacle
très physique et qui nécessite que les interprètes
aient une formation et une expérience très soutenue
et multiple. Il se trouve que l’acteur principal, Frédéric
Longbois, fait partie depuis de longues années de la
troupe de Jérôme Savary et a donc une très
grande expérience des rôles physiques, il est également
chanteur d’opéra et peut donc aisément jongler
avec tout ce que je lui propose.
Idem pour Thierry Laurion qui interprète
le personnage de Dorian Gray dans ce spectacle et qui est aussi
bon acrobate, danseur, que comédien (il tiendra un des
rôles principaux dans “La cage aux folles”
à la rentrée au Théâtre de la Porte
Saint-Martin).
Caroline Siméon, qui joue Alice, est
également une interprète physique très
prometteuse, jeune comédienne et contorsionniste-aérienne
qui a remplacé au pied-levé une autre interprète
qui n’était pas assez préparée pour
ce genre de performance.
En ce qui concerne les contraintes techniques,
je travaille beaucoup avec les nouvelles technologies numériques
d’image et de son ; j’aime beaucoup que l’idée
de “son et lumière” se conjugue très
minutieusement au jeu des acteurs.
Ce qui nécessite une grande confiance
de la part du lieu où est programmé le spectacle,
comme ici le Vingtième Théâtre, et toute
son équipe, qui nous a accueilli très chaleureusement
en faisant au mieux pour qu’on puisse continuer d’expérimenter
des choses nouvelles sur un spectacle qui avait déjà
été joué, ainsi le spectacle a beaucoup
changé…
Quels sont les retours du public ?
Lisa Guédy : Je pense que les spectateurs
sont surpris par la forme narrative, le spectacle est construit
comme le déroulement d’un rêve, c’est
à dire qu’il n’y a pas de début et
de fin comme on s’attend à les voir à leur
place de début et de fin… Il y a des phases et
des choses qui mènent à d’autres, grace
à un objet commun ou un sentiment… Les personnages
sont tous narrateurs de l’histoire des autres personnages,
à leurs façons… Quoi qu’il en soit,
la performance des acteurs ne laisse pas insensible…
Comment s'insère-t-il dans le cursus
de votre compagnie, la Compagnie Ribberliz ?
Lisa Guédy : Ce spectacle s’inscrit dans une série
qui porte le nom d’inquiétante étrangeté,
“unheimlichkeit” pour être exact, et qui a
été à l’origine de mon envie d’écrire
des spectacles où le son, la lumière et l’image
fabriquent une matière vivante qui évolue parrallèlement
aux personnages et les font s’influencer, se transformer
réciproquement, évoluent ensemble comme s’ils
se transcendaient, que le rapport initiatique se fonde en un
tout.
Travaillez-vous sur d'autres projets ?
Lisa Guédy : Je suis actuellement en
train de travailler en partenariat avec Arte sur des formes
courtes et destinées à être jouées
dans des endroits divers, comme la performance “EntreChats”
qui met en scène des bodybuilders et que l’on va
jouer plutôt dans des musées.
En ce qui concerne les pièces de théâtre,
je travaille à l’écriture d’un spectacle
autour de la mythologie du Loup dans la littérature,
et un autre sur le mythe d’Electre, également un
autre en réserve, un drame musical, sur le mythe de Salomé.
Il semblerait que je préfère
pour l’instant les personnages sanguinaires, les animaux
déguisés… |