La
Grande Halle de La Villette propose
avec "Kreyol Factory"
une exposition d'art contemporain d'envergure, dédiée
à la mémoire d'Aimé Césaire, homme
politique et poète martiniquais décédé
en 2008, qui regroupe l'œuvre de soixante artistes créoles
autour de la thématique de l'identité créole.
Cette exposition, qui s'inscrit dans une "saison créole"
comportant de nombreuses manifestations artistiques pluri-disciplinaires,
a été conçue par Yolande
Bacot, directrice de la programmation des expositions
du Parc de la Villette suite à la nomination de Jacques
Martial, d'origine guadeloupéenne, au poste de
président du Parc de la Villette dans le cadre d'une
"valorisation des cultures de la marge et de la périphérie"
et du métissage cullturel.
A partir des trois grandes thématiques que sont la quête
des racines, le colonialisme et la création de nouveaux
espaces de créolisation, le parcours de l'exposition
se décline en 7 séquences qui de la traversée
à l'émigration illustrent le questionnement identitaire
pris dans la mouvance de l'Histoire dans une très innovante
et réussie scénographie.
En
effet, Raymond Sarti s'est inspiré
de la métaphore de la traversée des esclaves pour
concevoir une scénographie sur le thème de la
mer.
Des cimaises en carton brut alvéolé qui rythment
et délimitent les différentes séquences
ponctuées d'espaces documentaires abrités dans
des tours en tôle ondulée, constituent une architecture
d'ensemble originale qui peut être mieux appréhendée
depuis l'étage.
"Des artistes interrogent les
identités créoles"
L'identité créole qui repose selon l'écrivain
Patrick Chamoiseau, "sur un lieu originel et une matrice
fondatrice : le gouffre du bateau négrier et la plantation
esclavagiste" se décline aujourd'hui et ici au pluriel
dans une exposition qui offre un large panorama de la création
artistique qui se conjugue toujours au social et au politique.
Peintures, sculptures, oeuvres d’art plastique, photographies,
et documentaires audiovisuels forment un corpus dense sous tendu
par un vrai propos muséal.
Créoles
insulaires ou créoles des diasporas, artistes reconnus
comme les plasticienne Jane Alexander ou Kara Walker dont les
oeuvres accueillent le visiteur au début de l'exposition
ou talents émergents, sélection d'œuvres
existantes et commandes spécifiques pour l'événement,
le panorama est large et révèle tant la diversité
des réflexions que des courants artistiques.
De l'homme lieu de mémoire de Jack Beng-Thi (bouleversant
"Nostlagique Sweet Vacoa") à la marée
de semelles de tongs collectées à marée
basse et aux lanières de barbelés de Tony Capellan,
des chariots de l'histoire de Marcos Lora Read ("Cinco
car-rosas para la historia") qui voisinent avec "La
dérive" du sculpteur, Patrick Vilaire, toutes les
oeuvres sont intéressantes tant au plan esthétique
que pour leur questionnement qui est toujours humaniste.
Procédant
par assemblage de matériaux, récupération
et détournement dans la veine la lignée du Nouveau
Réalisme comme Marcel Pinas, la peinture naïve de
André Pierre à la croisée de la peinture
populaire ou le détournement satirique des codes à
la manière du pop art avec "The Big One World"
de Bruno Peinado, tous les courants artistiques sont représentés.
Une exposition foisonnante qu'il faut absolument prendre le
temps de découvrir. |