Spectacle
seule en scène écrit et interprété
par Souâd Belhaddad sous le regard extérieur de
Anne-Laure Liégeois et la direction d'acteur de Hala
Ghosn.
Dans le cadre du Festival Sautes d'humour qui se déroule
au Tarmac de La Villette et ouvre ses portes aux rires et à
l'humour qui dérange venus d'outre Méditerranée,
Souâd Belhaddad, journaliste, écrivain, femme née
en Algérie et élevée en France, monte sur
scène avec un "seule en scène" intelligent,
décapant et drôle, ce qui n'est pas antinomique,
sur une thématique qui lui tient au cœur et à
la tête.
Car elle a "Beaucoup de choses
à nous dire", à nous spectateur de
toutes origines, de toutes obédiences et de toutes religions,
sur un sujet qu'elle connaît de l'intérieur, celui
de l'émigration maghrebine, dont elle fait une peinture
et une analyse sans concession au travers du parcours et de
la réflexion de deux personnages, deux femmes de générations
différentes, la mère et la fille, pour un vrai
regard de femme.
D'où un spectacle, conçu en deux parties complémentaires
s'éclairant l'une l'autre, qui aborde, par la voix de
la mère, la dualité schizophrénique d'identité
de l'émigrant de première génération,
ce fameux "Entre-deux Je" qui fut le sujet de son
premier livre, et, par celle de la fille née en France,
l'intégration des minorités dites "visibles"
et la discrimination positive.
La première est une femme d'origine modeste qui a son
libre penser et son franc parler, même si elle ne les
affiche pas ostensiblement, et témoigne à la fois
d'une grande humanité, d'un indéfectible attachement
à sa culture et à ses traditions et d'un solide
bon sens, écartant les amalgames, dénonçant
les stéréotypes et ramenant les choses à
leur vraie réalité, comme par exemple ne pas confondre
religion et foi. La seconde est l'incarnation idéale
de l’intégration réussie qui, bien que rencontrant
encore des difficultés, témoigne déjà
d'une certaine aspiration à un statut uniformisé.
Certes on est plus dans la réflexion et la démonstration
humaniste que dans la profération débridée
et viscérale mais cela n'empêche pas quelques coups
de gueule bien sentis.
Femme de lettres et de parole, Souâd Belhaddad a écrit
un texte qui est un petit bijou d'humour, de subtilité,
de conviction politique qui n'exclut pas l'autodérision.
Et puis, elle exulte sur scène en montrant un vrai talent
de comédienne, que ce soit dans le monologue de la première
partie, sous le regard extérieur de Anne-Laure
Liégeois ou dans la galerie de personnages désopilants
de la seconde sous la direction de Hala Ghosn
manifestant une aisance remarquable à endosser différentes
personnalités de manière toujours drôle
sans perdre son fil conducteur. Pour que tout qui doit être
dit soit dit. |