Comédie dramatique
de Martin Crimp, traduction de Philippe Djian, mise en scène
de Louis-Do de Lencquesaing avec Christine Boisson, Hélène Fillières
etLouis-Do de Lencquesaing.
Un couple banal, ordinaire, part vivre à la campagne où
il emmène ses non-dits, ses mensonges et ses petites habitudes
de discussions pseudo-intellectuelles. Lui, quadra bobo au look
arty, élégant et manipulateur. Elle, sentimentale
à la recherche des moments de bonheur. Entre eux, l’incarnation
fantomatique d’une jeune fille, une amante sans doute, qui
s’insinue entre eux par corps inerte interposé, histoire
de se donner des émotions à bon compte.
Et ils parlent, beaucoup, chacun pour soi ou pour pousser l’autre
dans ses retranchements à la manière d’un de
ces petits jeux de société cruels dont les anglais
ont le secret. Des mots, des phrases, des interrogations. Des sentiments,
des émotions, point, réduisant le spectateur en auditeur
souvent interloqué.
Les dialogues denses qui dissèquent, le recours sytématique
à la forme interrogative censée renforcer le poids
des mots (le "quoi ?" monocorde et récurrent devenant
tout bonnement horripilant), le décor métallique bleu-noir
et la mise en scène minimaliste centrée sur le phrasé
du texte, texte qui se veut, au moins dans sa traduction de Philippe
Djian, intellectuel et sophistiqué et qui est livré
impersonnel, mécanique, haché, rappellent inexorablement
les belles heures du théâtre d’avant-garde des
années 70. Et que dire du final avec la mise en lumière
de la tête de la jeune fille en arrière plan ?
Les acteurs réduits à être des diseurs de
mots perdent presque contenance sur scène au point où
leurs quelques mouvements (arpentage sans chaussure d’Hélène
Fillières à la diction complètement artificielle
ou moulinets de Christine Boisson parfois à la dérive)
paraissent complètement incongrus.
Au moins peut-on espérer que ce qui s’écoute
si mal en langue française se lise avec plus d’intérêt
en version originale... |