Sous
la bannière "Victory over
the future", la directrice du Multimedia Art Museum
de Moscou Olga Sviblova, qui était
déjà commissaire du Pavillon Russe pour la précédente
biennale, a souhaité réunir des artistes dont
l'œuvre "fondée sur les traditions de l’avant-garde
russe profondément ancrées dans l’art russe
contemporain aborderait la problématique de la responsabilité
tant individuelle que sociétale face au nouveau millénaire
articulée avec leur propre univers artistique".
A l'affiche, une belle homogénéité avec
sept artistes, dont six de la même génération,
nés dans les années 60, Alexei Kallima, Andrei
Molodkine, Pavel Pepperstein, Anatoli Shuravlev, Gueorgui Ostretsov,
et Serguei Shekhovtsov représentatifs de la scène
artistique desannées 80, et la benjamine, Irina Korina,
qui s'inscrivent dans la mouvance du conceptualisme moscovite
des années 1980.
L'art russe sous influence
En réaction au réalisme socialiste, le conceptualisme
moscovite, avec sa figure emblématique Ilya Kabakov,
qui érige l'art en instrument de critique a connu une
audience considérable en son temps et constitue donc
le fondement de l'art contemporain russe qu'on ne cesse de découvrir
notamment avec le médiatique Centre d'art contemporain
de Winzavod et l'effervescence des galeristes russes.
Homogénéité donc dans la filiation pour
les 7 mousquetaires de cette biennale mais dans des déclinaisons
au style bien personnel.
Les
trompe-œil pseudo-héraldiques de Sergey Shekhovtsov
investissent la façade du pavillon et les "Black
holes" de Anatoli Shuravlev, qui travaille sur la politique
de la représentation, dissimulent une fresque historique
miniature dans des billes de verre et des taches de peinture.
Avec sa "Rain Theorem", fresque fluorescente dont
il affectionne la technique et que certains avaient pu voir
en 2007 dans le cadre de l'exposition "Moscopolis"
à l'Espace Vuitton, Alexei Kallima, chantre de la réflexion
sur le conflit russo-tchétchène, met en scène
de manière métaphorique le processus du conflit
en résonance avec la théorie du chaos.
Andrei
Molodkine, connu pour ses grands formats réalisés
à l'aide de stylos Bic et ses sculptures emplies de pétrole,
le pétrole comme levier politique et économique,
et, pour lui, le seul médium capable de relier les notions
d’identités et de ressources nationales.
Avec "Le Rouge et le Noir", il s'empare d'une œuvre
symbolique, la Victoire de Samothrace emplie de deux liquides
vitaux, le pétrole et le sang, mais également
métaphores avec le pétrole tchétchène
et le sang des soldats russes, pour signifier l'ambivalence
de toute victoire.
Le
visiteur découvrira également des aquarelles de
Pavel Pepperstein, qui a également participé à
"Moscopolis", théoricien co-fondateur du groupe
expérimental l'Inspection Médicale Herméneutique,
qui travaille sur le sens des symboles et les signes de la culture
de masse et la fontaine "messagerienne" de Irina Korina,
qui était présente à l'exposition "Sots
Art" à la Maison Rouge, qui s'intéresse au
milieu environnemental post-soviétique et notamment l'utopie
de la belle vie symbolisée par le confort, l’esthétique
et le luxe.
Toujours dans l'archéologie utopique, l'installation
"Art Life or The Torments of Creation” de Gosha Ostretsov
et son monde fantôme dans lequel l’artiste est devenu
un mannequin mécanique.
Démonstration plutôt réussie donc pour
Olga Sviblova en attendant la prochaine biennale pour franchirn
peu-être, une étape chronologique avec une sélection
d'artistes émergents et les tendances de la scène
artistique russe des années 2000-2010. |