Mitch Hooper est l'un
des quatre mousquetaires de la Compagnie du Théâtre
Vivant. Anglais, auteur et metteur en scène, il ne désespère
pas de passer derrière la caméra.
Il a accepté de nous rencontrer à la sortie d'une
représentation de "Théâtre" la pièce
de Jean Luc Jeener mise en scène par Carlotta Clerici et
interprétée, entre autres, par Anne Coutureau.
Comment êtes-vous venu au théâtre
?
Mitch Hooper : Je suis anglais. J’ai un parcours
un peu différent des autres. Mes grands souvenirs de théâtre
sont plus des souvenirs de lectures d’adolescence. Ensuite
quand j’ai assisté à des représentations,
ça me plaisait ou pas mais en tout cas cela me passionnait.
Pour moi le théâtre commence avec Shakespeare et les
mots mais il faut leur donner chair aux mots.
Vous dîtes que parfois vous appréciiez
et parfois non. Vous aviez déjà des conceptions arrêtées
sur le sujet ?
Mitch Hooper : Je n’avais pas de pré-conceptions
mais je me souviens que le premier texte que j’ai lu est Mac
Beth de Shakespeare et cela m’a profondément marqué.
Quand je l’ai vu sur scène j’ai été
très déçu.
Entre l’enthousiasme suscité par la
lecture et la représentation, il y avait un hiatus ?
Mitch Hooper : Oui. Ça ne prenait pas
vie. Les décors étaient encombrants, les acteurs ne
semblaient pas à l’aise, la mise en scène n’était
pas totalement cohérente. Et au lieu d’être transporté
par le texte, on était seulement assis dans une salle à
regarder des gens.
Donc très jeune, vous preniez déjà
du recul par rapport à ce qui vous était proposé
et ce de manière critique ?
Mitch Hooper : Oui. C’est inné. C’est
ce que fait n’importe quel spectateur de manière naturelle.
On y croit ou on n’y croit pas. Et quand je n’y croyais
pas j’en cherchais la cause.
A la base c’est une démarche complètement
intuitive mais ensuite il y a un travail d’analyse et de réflexion.
Quand je fais de la mise en scène, c’est intuitif.
Je ne viens jamais avec des pré-conceptions intellectuelles.
Je choisis les acteurs et ce sont les acteurs qui proposent. Je
fais un travail négatif c’est-à-dire que je
dis ce qui ne va pas. Je leur demande d’explorer d’autres
voies. Ce que je dis souvent aux acteurs c’est Parle-lui.
Ne t’écoute pas. Parle lui et essaie de le convaincre.
C’est une façon de marcher, une intonation de voix,
c’est tout simple.
Et quand vous faites ce travail, cherchant à
être convaincu, vous êtes dans la peau d’un spectateur
?
Mitch Hooper : Un peu plus que d’un spectateur
ordinaire parce que je suis le garant de la cohérence du
spectacle. Tout doit concourir à une unité. Ce qui
me plaît au théâtre c’est quand tout a
un sens, va dans une direction.
Au début des répétitions vous
n’avez donc aucune idée préconçue sur
la direction dans laquelle le texte s’orientera. C’est
un travail de recherche ?
Mitch Hooper : C’est surtout une recherche.
Il existe quand même une idée un peu vague puisqu’on
a choisi la pièce et les acteurs, ce qui n’est pas
neutre. Je me laisse surprendre par les acteurs et souvent les acteurs
proposent des choses auxquelles je n’avais pas pensé.
Cela permet d’approfondir ma pensée et le spectacle
en sort enrichi. Justement car il s’agit d’une matière
vivante. Je ne décide pas unilatéralement de ce que
l’on va faire. C’est plus de la sculpture que du dessin.
Vous êtes également auteur dramatique.
Mettez-vous systématiquement en scène vos pièces
?
Mitch Hooper : Non. Je ne l’ai fait que 2 fois.
La première pour les 3 monologues qui constituaient la pièce
"Chroniques d’une année de crise". Et pendant
ce temps Jean-Luc Jeener m’a demandé d’écrire
un texte, j’étais flatté et content de le faire.
Je lui ai demandé le thème de la saison et il s’agissait
de la pédophilie. (Sourire et yeux
interloqués)
Et vous aviez accepté avant même de
connaître le thème imposé ?
Mitch Hooper : J’étais partant. Mais
j’ai eu un doute car je n’y connaissais rien et j’ai
donc du me documenter et cela a donné "L’amour
existe". Avec Yvan Garouel et Anne Coutureau. Elle est reprise
actuellement en Belgique à Bruxelles dans une mise en scène
assez proche de la mienne.
Est-ce plus aisé de mettre en scène
ses propres textes ?
Mitch Hooper : Non. Quand je suis metteur en
scène, je procède de la même manière
quel que soit l’auteur du texte.
Quand il s’agit d’une de mes pièces,
il m’arrive même de dire qu’on ne peut pas savoir
ce que veut dire l’auteur. Je dissocie complètement
les deux exercices. D’ailleurs quand j’écris
je ne sais pas plus où je vais que quand je mets en scène.
Les personnages doivent prendre vie et si on a idées préconçues
pour forcer les personnages à entrer dans les mots, cela
ne fonctionne plus. Il faut laisser vivre les personnages et ce
sont eux qui me surprennent.
Etes-vous monté sur scène comme acteur
?
Mitch Hooper : J’ai joué parfois mais
je n’ai pas de formation d’acteur et je n’avais
pas l’ambition de devenir acteur.
Que s’est-il passé entre le moment
où vous avez découvert votre passion pour le théâtre
et où vous êtes entré dans l’univers du
théâtre ?
Mitch Hooper : J’avais l’ambition de devenir
auteur et je suis venue à la mise en scène…par
hasard. J’ai pris énormément de plaisir à
la faire et j’ai donc continué.
L’écriture au sens large du terme où
spécifiquement pour le théâtre car vous avez
aussi écrit pour le cinéma et la télévision
?
Mitch Hooper : Je voulais écrire. Mais très
vite, je me suis orienté vers la forme dramatique mais sans
l’idée d’exclusive. En ce moment, je travaille
beaucoup pour sur des projets cinématographiques. La semaine
dernière, j’ai travaillé sur un scénario
pour le cinéma dans le cadre d’un projet avec Andrej
Zulawski. Et j’ai également travaillé sur deux
scénarios pour la télévision.
Pour vous, existe-t-il une différence entre
l’écriture théâtrale et l’écriture
pour la pellicule ?
Mitch Hooper : Il y a une première différence
de taille : pour le cinéma, je suis payé ! (sourires)
En utilisant un terme un peu péjoratif, le
Théâtre vivant est-il votre danseuse ?
Mitch Hooper : Si c’est ma danseuse, je ne désespère
pas qu’elle devienne un jour professionnelle. C’est
la finalité de la Compagnie du Théâtre Vivant.
Se réunir pour essayer de toucher plus de gens pour aller
plus loin.
La rencontre des autres membres de la Compagnie
est fortuite ?
Mitch Hooper : Qui sait ?
Le hasard n’existe pas !
Mitch Hooper : J’ai vu Yvan Garouel jouer et
nous avons travaillé ensemble sur "Chroniques d’une
année de crise" et par son intermédiaire j’ai
connu Anne Coutureau et Carlotta Clerici.
Quand vous êtes-vous rendu compte que vous
aviez des points de vue et des exigences communs et envie de faire
le même théâtre ?
Mitch Hooper : Le révélateur a été
la pièce L’amour existe qui retrace un huis clos entre
un tueur d’enfants et sa psychiatre. L’idée a
germé dans l’esprit de Carlotta Clerici à la
lecture de mes notes de mise en scène.
Il s’agit des notes "Nous sommes tous
amplement conscients du désespoir et du vide. La laideur
du monde est partout apparente. Il ne suffit plus d'en témoigner,
il faut y résister".
Mitch Hooper : Oui, effectivement.
Carlotta Clerici a suivi une formation universitaire
en matière théâtrale. Elle a donc réfléchi,
formalisé et théoriser en la matière. En est-il
de même pour vous ?
Mitch Hooper : J’ai fait des études littéraires.
Quand cela était possible, je choisissais des options qui
traitaient du théâtre. A ce propos, j’ai passé
un an à réfléchir sur la définition
de la tragédie. Mais je n’ai pas l’esprit universitaire.
Dans la Compagnie, y a-t-il des théoriciens
?
Mitch Hooper : Nous étions conscient qu’il
fallait argumenter notre position car dans un monde du théâtre,
notamment dans le théâtre subventionné, il y
a de nombreux courants idéologiques. Nous souhaitions donc
affirmer et démontrer que notre travail reposait sur des
bases solides et réfléchies. D’autant que notre
travail est très souvent critiqué de manière
virulente en disant qu’il s’agit de naturalisme, de
jeu à la manière des sitcoms.
Nous faisons un théâtre qui ne sort pas
vraiment des conventions mais nous voulions prouver que notre théâtre
résultait d’un choix délibéré
et non d’une impossibilité à faire autre chose.
Il est évident que peu de gens impliqués
dans le monde du théâtre parle du spectateur comme
vous le faites par exemple.
Mitch Hooper : Il est évident qua dans la plupart
des spectacles, le spectateur est considéré comme
une quantité négligeable. Il est presque superflu.
Le spectacle se déroule malgré lui.
Depuis la naissance officielle de votre compagnie,
avez-vous le sentiment ou des manifestations concrètes que
votre audience s’est élargie ?
Mitch Hooper : Ça commence. On sent un frémissement.
L’édition de notre manifeste, l’énumération
des spectacles que nous avons montés, et l’année
dernière fut une année riche, nous donne davantage
de crédibilité. Nous n’avons pas encore franchi
le cap de demander des subventions. Mais nous ressentons que se
manifeste un intérêt tangible pour notre démarche.
Pour le moment, cela n’a pas encore d’impact
en termes de facilités pour monter vos spectacles ?
Mitch Hooper : Pour le moment, cela reste difficile.
Vous êtes quatre membres fondateurs. Envisagez-vous
d’ouvrir la compagnie à d’autres personnes, acteurs,
metteurs en scène qui partageraient votre point de vue ?
Mitch Hooper : Nous n’en avons pas vraiment
parlé. Pour le moment nous sommes quatre. S’agissant
des comédiens, nous avons tout un cercle d’acteurs
sur lesquels nous pouvons compter et qui sont partants pour travailler
avec nous. S’agissant des metteurs en scène, une trop
grande ouverture est un facteur de dispersion des énergies
et de diluer l’image du théâtre vivant du fait
d’une trop grande variété.
Actuellement vous êtes dans le cinéma.
Mais avez-vous des projets en matière théâtrale
?
Mitch Hooper : Les projets sont encore incertains.
Toutefois, j’ai écrit une pièce qui s’appelle
"La mémoire du détail" que je voudrais monter
avec Fanny Cottençon dans le rôle principal et pour
laquelle j’ai demandé une aide à la création.
Car je voudrais la monter dans un théâtre privé
un peu plus grand que le Théâtre du Nord-Ouest. Par
ailleurs, il y a un cycle Feydeau en préparation au Théâtre
du Nord-Ouest et je suis assez tenté. Dans l’absolu,
je voudrais monter Pinter qui est un auteur avec qui j’ai
un rapport privilégié. J’ai découvert
Pinter à l’école en même temps que Shakespeare.
J’ai eu la chance de travailler avec lui et de connaître
l’homme. Et puis, j’aimerai monter Shakespeare.
Y a-t-il des projets de reprise de vos spectacles
?
Mitch Hooper : Non, il n’y a rien de précis
dans l’immédiat.
Votre réponse anticipe sur la question que
je voulais vous poser quant au fait d’être ainsi regroupés,
deux auteurs-metteurs en scène et deux acteurs –metteurs
en scène, si cela impliquait que vous alliez travailler en
vase clos ?
Mitch Hooper : Non. Nous n’allons pas nous limiter
à nos propres textes.
Dans les deux sens ? Vous acceptez également
que vos textes soient montés par d’autres ?
Mitch Hooper : Oui.
Et même si ce sont des personnes qui ne le
montent pas de la même manière ?
Mitch Hooper : Oui. Et dans ce cas, ce n’est
pas du théâtre vivant. Il n’est pas question
de censurer les gens. Ainsi à Bruxelles la mise en scène
est assez proche de la mienne mais il ne s’agit pas d’un
projet du Théâtre Vivant.
Et en réciproque, peut-on envisager que vous
approuviez certains spectacles ?
Mitch Hooper : Nous y avons effectivement réfléchi.
S’il fallait créer une sorte de label Théâtre
Vivant. C’est une possibilité. Ce serait d’ailleurs
très intéressant de rencontrer d’autres personnes
qui travaillent dans la même direction et le même esprit.
Allez-vous au théâtre ?
Mitch Hooper : Oui. vendredi je suis allé voir
"Le dernier caravanserail" à la Cartoucherie. Je
n’y vais pas aussi souvent que je voudrais. Et je suis souvent
déçu. Le plus difficile est d’identifier les
gens qui font le travail que j’aime.
Comment procédez-vous pour faire un choix
parmi tous les spectacles à l’affiche ?
Mitch Hooper : Je procède de manière
empirique. Et, étant dans le métier, je suis souvent
invité.
Pensez-vous qu’il y a toujours un intérêt
ou une leçon à tirer de tout spectacle même
raté ou mauvais ?
Mitch Hooper : Oui, cela nourrit toujours la réflexion.
Surtout si le spectacle contient lui-même une réflexion.
Ce qui n’est pas toujours le cas. Parfois c’est tout
simplement mauvais. Je suis souvent déçu mais je ne
peux pas dire que je m’ennuie au théâtre. Je
vois souvent des gens qui dorment durant la représentation,
et qui dorment bien. Et ce sont souvent les plus enthousiastes à
la fin. Cela m’étonne. Je ne comprends pas. Si le spectacle
ne me plait pas, je ne dors pas. Cela plutôt tendance à
me mettre en colère. En revanche, le cinéma peut me
donner sommeil car les acteurs joueront de la même façon
quelle que soit ma réaction. Mais au théâtre,
je fais partie du spectacle. Je ne peux pas m’endormir.
De toute façon, votre oeil n’est pas
celui d’un spectateur ordinaire.
Mitch Hooper : Oui, je m’en rends compte et
surtout quand je vais au théâtre avec des personnes
qui ne sont pas du métier. Je suis plus critique. Rien ne
m’échappe dans le jeu des acteurs par exemple. Mais
dans le travail, il faut être exigent. Et j’ai toujours
été ainsi.
Et cet oeil critique auriez-vous envie de l’exercer
en tant que spectateur professionnel pour chroniquer les spectacles
?
Mitch Hooper : Non. Je n’ai pas eu de proposition
en ce sens. Et ce n’est pas ce qui m’intéresse
le plus. Et en France, la critique susciterait un vrai débat…pour
une autre interview (sourires).
Y a-t-il néanmoins quelque spectacles parmi
ceux que vous avez vus qui sortent un peu du lot ?
Mitch Hooper : J’ai trouvé intéressant
la pièce de Martin Crimp "La campagne" qui s’est
joué au Théâtre de l’œuvre. Ce n’était
pas complètement réussi mais l’auteur m’intéresse.
Vous parliez de Pinter et Shakespeare. En quelle
langue les monteriez-vous ?
Mitch Hooper : En français.
Etant anglais, cela ne vous paraît-il pas
anachronique voire choquant de voir leurs pièces montées
en français ?
Mitch Hooper : Oui. Surtout Shakespeare. Cela nécessite
un énorme travail d’adaptation. Pour Shakespeare c’est
même impossible. Toutefois, on peut faire quelque chose très
beau qui se rapproche de l’œuvre originale. De plus,
le texte est très riche. On en peut pas tout garder tous
les sens plus la musique des mots. Un travail honorable est possible.
Pour Pinter, il en va différemment. Il y a les adaptations
d’Eric Kahane mais elles commencent à dater un peu.
Elles nécessitent d’être retravaillées
et c’est en cours.
Je reviens aux spectacles que vous avez appréciés.
Mitch Hooper : La première partie du dernier
caravansérail est un travail très honorable même
s’il est éloigné de ce que nous faisons. Mais
il est composé d’une suite de scènes sans véritable
construction dramatique. Mais c’était à faire
car il s’agit d’un thème qui m’intéresse
en tant qu’auteur. Et comme ça m’intéresse
je suis plus critique. Je n’aime pas tout ce qui se fait dans
le théâtre subventionné mais le travail de Peter
Brook et d’Ariane Mnouchkine est incontournable.
Pour revenir une fois encore à Shakespeare
et Pinter, vous n’auriez pas envie de les monter en langue
originale et en Angleterre ?
Mitch Hooper : Ce n’est pas l’envie qui
me manque mais je suis basé à Paris et cela serait
difficile. L’audience du Théâtre Vivant m’en
donnera peut-être l’opportunité.
Revenons au Théâtre Vivant. Vous utilisez
des termes assez forts, chargés, avec un contenu idéologique
notamment celui de mission.
Mitch Hooper : Je pense que compte tenu de la situation
dans laquelle se trouve le monde, il faut reconnaître que
ce que nous faisons, qui est certes à contre courant, est
pour le bien de l’humanité. Cela peut paraître
très prétentieux mais au fond il faut assumer ce que
l’on fait. Auparavant, nous le faisions sans le savoir maintenant
nous le savons et nous commençons à le dire tout en
nous gardant de tout discours idéologique qui nous enfermerait
dans un carcan. Nous ne sommes pas là pour prêcher.
Notre théâtre est exempt de tout dogme. Et il faut
que nous soyons vigilants sur ce point. Notre matière première
c’est la vie. S’enfermer dans un dogme c’est la
mort. Au théâtre, on se remet en question tous jours.
C’est obligatoire, naturel. Si on ne le fait pas, le théâtre
le fait pour nous. Les acteurs sont remis en question à chaque
seconde au cours de la représentation.
Si vous aviez carte blanche, financièrement,
et peu de temps pour réfléchir, que feriez-vous ?
Mitch Hooper : Je concrétiserais tous les projets
que j’ai évoqués. Pour le moment comme le théâtre
vivant ne peut se faire que dans de petites salles intimistes. Ce
qui ne veut pas dire qu’il ne pourra pas évoluer pour
être joué dans des salles plus grandes dans l’avenir.
Mais alors, il faudra une réflexion préalable sur
la manière d’ouvrir le spectacles à un espace
plus grand. Actuellement, nous sommes obligés au plan économique
de jouer dans de petits espaces et cela nous arrange. Car nous tirons
profit de l’intimité de ces petites salles. Nous avons
plein de projets. Ce ne sont pas les pièces qui manquent.
Et puis des pièces à écrire. Mais je manque
de temps.
Ecrivez-vous de la même façon pour
le théâtre et pour le cinéma et la télévision
qui sont plus des commandes ?
Mitch Hooper : J’ai la chance de pouvoir travailler
pour la télévision dans de petites productions un
peu en marge qui me permettent, même à partir d’une
commande, de faire quelque chose d’honorable, dont je n’ai
pas honte. Ce n’est pas purement alimentaire. J’en vis
mais j’y trouve mon compte en tant qu’auteur. Je ne
vais pas à l’encontre de mes convictions. J’ai
écrit un téléfilm pour un ami qui est réalisateur
Stéphane Kurk qui m’a laissé toute liberté.
Je l’ai écrit pour lui sur son idée. Il est
tourné et passera sur France 3 sans doute en 2005. Il s’intitule
"Une nouvelle vie" pour le moment.
Et vous gardez la main jusqu’où ?
Mitch Hooper : Jusqu’au tournage.
Cela ne vous tente pas d’être réalisateur
?
Mitch Hooper : Si. J’aimerais passer à
la réalisation. Assez vite d’ailleurs. Mon projet initial
était de faire quelques scénarios et de passer à
la réalisation. Mais cela a pris plus de temps que prévu.
Je commence à avoir une certaine expérience. Mais
le tournage est une affaire compliquée. Ce qui me chagrine
c’est le manque de temps pour diriger les acteurs, notamment
à la télévision.
D’autant qu’au sein du théâtre
vivant le travail primordial de répétition s’inscrit
dans la durée ce qui paraît incompatible avec les échéances
fixées au cinéma.
Mitch Hooper : Je trouve aberrant qu’il n’y
ait pas de répétitions au cinéma. Les acteurs
de cinéma disent souvent que les répétitions
tueraient la spontanéité. Mais cela relève
de la paresse pure. Or au théâtre on répète.
Cela permet à l’acteur d’absorber tout ce qui
va nourrir le personnage et de jouer spontanément le texte.
Ainsi à la télévision, les acteurs confondent
le manque d’intonation avec le naturel. En fait, ils se bornent
à réciter le texte. Ce n’est pas ça le
naturel. Le naturel c’est vivre ce que l’on dit.
Quelle est la situation du théâtre
en Angleterre ?
Mitch Hooper : Elle est un meilleur qu’en France
car il n’existe pas tous ces clivages. Mais la situation commence
à se dégrader avec la prolifération de spectacles
sans intérêt.
Pourquoi écrivez-vous en langue française
?
Mitch Hooper : Pour deux raisons. Ne s’agissant pas de ma
langue naturelle, cela m’impose une certaine discipline. La
deuxième raison est que mon vocabulaire est moins riche en
français ce qui me permet d’être plus direct,
d’aller à l’essentiel sans me perdre dans des digressions. |