Ballets
russes, Diaghilev, Nijinski, Balanchine, Pavlova sont des noms
inscrits dans l'imaginaire collectif qui évoquent le
foisonnement artistique du début du 20ème siècle
même pour ceux qui ne sont pas des amateurs éclairés
du 5ème art.
Aussi cette exposition, simplement intitulée "Les
Ballets russes", organisée par la Bibliothèque
Nationale de France qui, de surcroît, met en exergue
le rôle novateur, et même révolutionnaire,
de cette troupe au regard de l'art de la danse, intéressera-t-elle
tous les publics.
Par ailleurs, inaugurée en novembre 2009, elle coïncide
avec le centième anniversaire de la première saison
des Ballets russes à Paris et, s'achevant en mai 2010,
s'inscrit dans le cadre de l'Année de la Russie en France.
Les Ballets russes ayant fait, en leur temps, les beaux jours
de l'Opéra de Paris, cette exposition siège tout
naturellement à la Bibliothèque-musée
de l'Opéra National de Paris qui compte pas moins
de douze de leurs ballets à son répertoire et
a présenté en décembre 2009 quatre ballets
dans leur chorégraphie d’origine.
Pour
présenter une centaine d’oeuvres parmi les plus
importantes des collections de la BnF, dans une scénographie
judicieuse de Julie Boidin appropriée
à l'exiguité des lieux et à la présentation
sous vitrine des pièces fragiles telles que les costumes
et les objets ayant appartenu à Diaghilev, les commissaires
Mathias Auclair et Pierre
Vidal, respectivement conservateur et directeur de la
Bibliothèque-musée de l’Opéra, ont
opté pour un parcours chronologique.
Parcours qui sied à cette exposition-rétrospective
et illustre parfaitement l'évolution stylistique incessante
qu'ont connu les ballets russes sous l'impulsion de leur fondateur
et mentor Serge Diaghilev.
Les Ballets russes : les révolutionnaires
de la danse
Le succès mondial et le caractère novateur des
mythiques Ballets russes pendant vingt années, de la
Belle Epoque aux Années Folles, sont dus à la
personnalité hors du commun de son fondateur et de son
directeur, Serge de Diaghilev, que le danseur Serge Lifar qualifiait
de "noble et ardent Chevalier de la plus grande croisade
des Arts du 20ème siècle" à l'origine
de "la renaissance de l’art dans le monde".
Amateur
et critique d'art, directeur artistique visionnaire, Diaghilev
dispose d'un talent inestimable, celui de repérer et
de fédérer les talents émergents non seulement
dans l'art chorégraphique mais également dans
tous les arts qui sont mis au service du ballet pour en faire
un véritable spectacle total.
Fondée en 1907 avec les meilleurs éléments
du Théâtre Mariinsky de Saint-Pétersbourg,
la troupe des Ballets russes, qui a à son actif un nombre
considérable de créations et dont la lecture des
affiches est impressionnante.
Y figurent outre les danseurs et chorégraphes de légende
(Balanchine, Lifar, Nijinski, Pavlova pour les plus connus du
grand public), tous les grands compositeurs russes, Stravinski,
Rimsky-Korsakoff, Prokofiev, Moussorgski, mais également
Chopin, Schumann, Ravel, Satie, Debussy, Poulenc, Sauguet entre
autres, la crème des peintres modernes qui participa
à la création des décors et des costumes,
de Picasso à Chirico en passant par Matisse et Derain
et l'avant garde russe avec Michel Larionov et Natalia Gontcharova.
L'exposition
s'articule autour de l'évolution permanente de l'esthétique
véhiculée par les Ballets russes qui s'est avéré
être un véritable choc culturel doublé d'un
choc artistique ayant suscité autant d'engouements indéfectibles
que de violentes controverses.
En rupture radicale avec la danse classique, une danse académique
et romantique caractérisée par la tradition du
ballet blanc avec l'omnipotence de la ballerine éthérée
en tutu et le fade décor de fond de scène, et
sous l'impulsion de Serge Diaghilev qui s'entoure de chorégraphes
qui subliment la virtuosité technique de danseurs fougueux
et expressifs qui ont le sens du spectacle, les Ballets russes
bousculent tous les codes ce qu'attestent les oeuvres exposées.
La révolution technique s'accompagne d'une révolution
stylistique.
Ainsi aux évolutions des danseurs devant de plats et
fades décors de fond de scène, sont substitués
de véritables mises en scène avec reconstruction
de l'espace scénique.
Qu'ils
soient l'oeuvre des peintres-décorateurs de théâtre
puis des peintres, sculpteurs et plasticiens, des décors
ébouriffants contribuent au spectacle en misant sur l'exubérance
des couleurs et le syncrétisme de folklores exotiques
en symbiose avec la vogue de l'orientalisme puis le modernisme
en liaison avec le cubisme et le futurisme.
Il en va de même pour les costumes fantaisistes qui remplacent
l'épure du tutu et du collant à l'image de ceux
du fameux ballet "Parade".
La visite de cette passionnante exposition, qui permet également
une belle incursion dans l'art moderne, se cumule avec celle
du Palais Garnier. Attention cependant à bien choisir
votre jour de visite si vous souhaitez accéder à
la salle de représentation qui est parfois fermée
pour répétition. |