Spectacle
mis en scène et interprété par Vanda Benes
d’après le roman de Christophe Prigent.
A partir d'un fait divers emprunté à une émission radiophonique de Pierre Bellemare, Christian Prigent a écrit un roman en vers autour du personnage de Béla Kiss, sorte de Landru hongrois, qui tuaient les femmes avec lesquelles il avait essayé d'avoir un rapport et conservaient les corps dans des bidons d'alcool.
Vanda Bénès tire de ce roman une série scènes, récits de situations relatant la frustration de Béla Kiss due à l'acte sexuel manqué et le passage à l'acte meurtrier qui s'en suit.
Le texte joue principalement des mots-valise et des homophonies pour créer des ouvertures au champ des images inconscientes, qui débouchent parfois sur le rire, libérateur. Avec un texte difficile, mais très rythmé, Vanda Bénès, seule en scène, décor minimaliste, appuie les effets de répétition afin de créer le comique, forme de distanciation au texte et au sujet. Sa prestation d'actrice, ou de conteuse, est splendide.
Pourtant, puisque le sujet du texte semble n'être que prétexte
pour travailler la langue au forceps, le spectateur se trouve
dans une position délicate, et en tout cas pas dans la position
de celui qui vient assister à un divertissement. On peut comprendre
le plaisir de l'auteur à travailler son matériau, celui du lecteur
à trouver le rythme des mots, à revenir en arrière, à s'arrêter
pour réaliser ce à quoi telle ou telle onomatopée lui aura fait
penser de manière inattendue, le plaisir de l'actrice de s'attaquer
à un texte dense et un langage presque neuf. Mais le spectateur?
Il se retrouve face à une œuvre présentée dans langage déstructuré
qui ne propose pas de solution pour recomposer l'univers décrit,
devient donc dépourvu de signification, et dès lors de sens.
Parfois, il rit à la répétition des "Dans le bidon! Suivante!"
qui clôturent chaque scène, ou devant quelques néologismes poétiques
amusants, mais souvent il se sent brinqueballé au milieu d'un
texte qui n'existe que dans la puissance de l'instant, trop
rapide pour qu'il le saisisse, se l'approprie et s'en fasse
l'acteur.
Au sortir, le même sentiment que celui laissé par un rendez-vous avec une jolie femme qui serait par trop consciente de ses atouts. Une excitation de départ qui se vide de désir pour déboucher sur la frustration. C'est peut-être là une explication au titre de ce spectacle. |