Comédie
dramatique de Woody Allen, mise en scène de Martine Delor,
avec Yahui Chan, Patricia Couvillers, Karine Kadi, Antonio Labati
et Claude Rochet.
Prenez des ingrédients basiques : une psychanalyste belle femme,
intelligente, dynamique, parvenue au faîte de la réussite professionnelle,
une bimbo dont le QI est inversement proportionnel à son charisme
sexuel chèrement entretenu à coups de gym, botox et lifting,
un écrivain raté reconverti dans l'écriture de feuilletons télévisés
lénifiants, un avocat de renom atteint de frénésie sexuelle
et une nymphette pauvre petite fille riche.
Plongez-les tous crus dans un bouillon névrotique de première qualité immodérément mouillé d'un alcool fort. Egouttez-les encore frétillants. Servez-les nappés d'un moelleux coulis d'intelligentsia juive new-yorkaise confit dans l'angoisse existentielle et vous obtiendrez "Central Park West", pièce en un acte de Woody Allen, qui revisite le classique et pathétique petit adultère entre amis et dans laquelle se retrouvent toutes ses thématiques récurrentes que sont l'amour, le sexe, la trahison, la psychanalyse, l'écriture.
A condition bien évidemment de connaître le secret du chef qui tient en un assaisonnement sucré-salé à l'humour noir, tendre et cynique, et gaiement désespéré et à un tour de main kalachnikovien pour mitrailler des dialogues percutants et décapants.
Le délicieux plat servi par Martine Delor
sous le titre "Rififi à Central Park"
qui se concentre sur le grand déballage en forme de règlement
de comptes qui en résulte, est tout à fait réussi et, grâce
à un joli quintet de comédiens, mérite bien une étoile au guide
Poquelin du théâtre.
Le spectacle est mis en scène avec autant d'e sensibilité que d'efficacité comique pour montrer que ces pauvres pantins n'en sont pas moins des êtres humains tyrannisés par leurs pulsions et leurs peurs tout en conservant le rythme de cette tragi-comédie trépidante.
Sur scène, Antonio Labati sous influence
d'un démon de midi pris dans les rets d'une fleur du pays du
soleil levant à peine éclose (Yahui Chan)
et Claude Rochet très juste et convaincant
dans le rôle auto-écrit par Woody Allen du scribouillard maniaco-dépressif,
suicidaire et adepte des cours de cuisine cacher traditionnel,
sans toutefois en copier le jeu, encadrent les deux principales
protagonistes.
Patricia Couvillers, toute en superbe déstabilisée par la faillite de sa vie personnelle, et Karine Kadi, excellente dans le rôle de la ravissante idiote, qui se taillent la part des lionnes dans un duel à fleurets non mouchetés particulièrement féroce, font de cette fantaisie dramatique un vrai et irrésistible régal. |