Spectacle
conçu et mis en scène par Gabriel Garran d’après
la correspondance Jouvet-Gary et "Tulipe ou la Protestation"
de Romain Gary, avec Audrey Bonnet, Guillaume Durieux, Jean-Paul
Farré, Jean-Pierre Léonardini, Sava Lolov et Pierre
Vial.
Fondateur du Théâtre de la Commune en 1965, Gabriel Garran y revient avec "Gary-Jouvet 45-51" spectacle qu'il a conçu et mis en scène à partir de l'échange épistolaire, certainement largement inconnu du public, entre le grand homme de théâtre qu'était Louis Jouvet et l'écrivain et diplomate Romain Gary qui se découvre une vocation d'auteur dramatique
Cette correspondance pourrait s'intituler ironiquement "Le diplomate et le cabot", le premier étant Jouvet, dont le franc parler et les formules lapidaires étaient connus, qui, après l'enthousiasme de la découverte d'un nouvel auteur s'annonçant prometteur, ménage sa plume pour, certes, lui prodiguer les conseils avisés d'un expert théâtral, mais également prendre ses distances. Le cabot, c'est Gary qui, fort de la célébrité acquise à la suite de la publication de son premier roman "Education européenne", et sans doute à juste titre visionnaire de de sa propre destinée littéraire, clame qu'il est las du talent et qu'il aspire tout simplement au génie.
Le contenu rédactionnel de cette correspondance, constituée
de missives voire de télégrammes bien qu'étendue sur six années
et telle qu'elle est partiellement dévoilée sur scène, est relativement
sommaire et ne témoigne pas d'une véritable empathie entre les
interlocuteurs même si Gary, admiratif mais intéressé, fait
momentanément allégeance devant la sommité et le substitut de
figure paternelle que peut représenter Jouvet à ses yeux.
Quant à la pièce pré-beckettienne dont elle est l'objet, "Tulipe ou la Protestation", et dont Gabriel Garran instille quelques scènes dans ce qu'il qualifie de "sorte de mise en abyme, de vision pirandellienne", force est de constater qu'elle ne peut satisfaire à la trinité dramatique de Jouvet quant à la situation dramatique qui doit contenir le thème, les personnages et l'intrigue.
Difficile de cerner le propos de ce spectacle assez étale que
Gabriel Garran indique avoir monté "pour sortir d’un théâtre
linéaire et conserver cette idée que la vérité ne se dévoile
qu’à travers de multiples petits bouts d’événements" : le manque
de clairvoyance de Jouvet, la pré-science de Gary ?
Les personnages de Louis Jouvet et Romain Gary (Jean-Pierre
Léonardini et Sava Lolov très
statiques) apparaissent alternativement dans des halos lumineux
pour lire leur missive. Sur la scène sur la scène donc, officient
Audrey Bonnet, Guillaume
Durieux, Pierre Vial, sociétaire
de la Comédie Française et Jean-Paul Farré,
récemment moliérisé pour le meilleur spectacle musical 2010
qui joue le rôle du clown tragicomique, factotum idéaliste
de l'auteur. |