Tout
le monde connaît le bar-autruches de l'élysée pompidolien, les
moutons-siège, le canon-banane "Juanita-Banana" qui délivre
des cigares, "l'homme à la tête de chou" qui inspira Gainsbourg
ou "The YSL bar" dont le prix s'est envolé lors de la vente
en 2009 de la collection Yves Saint Laurent-Pierre Bergé.
Des Lalanne bien sûr. "Les Lalanne",
Claude et François-Xavier, le couple d'artistes qui, s'il faisait
signature commune, ne travaillaient pas à quatre mains, chacun
ayant sa technique et son univers qui se trouvaient heureusement
complémentaires.
Le Musée des Arts Décoratifs organise
la première rétrospective de 40 années de création à partir
d'oeuvres détenues essentiellement par des collectionneurs privés.
Conçue
par Béatrice Salmon, directrice du
Musée des Arts décoratifs, elle se déroule selon une approche
chrono-thématique dans la grande nef du musée dans une scénographie
de l'architecte newyorkais Peter Marino.
Ce dernier, qui fut l'ami du couple et possède la plus grande
collection de leurs oeuvres, a opté pour une présentation très
classique dans les salles latérales et une mise en scène bucolique
pour la nef tapissée de rideaux de feuillages artificiels.
Des objets du quotidien à la sculpture
monumentale : "le naturel des choses étranges et l'étrangeté
des choses naturelles"
Le
visiteur est accueilli symboliquement par les artistes avec
les statues de l'homme et de la femme à tête de chou.
Les moutons-siège paissent tranquillement au pied du Chateau
de Renonceau reproduit sur une cimaise translucide derrière
laquelle un large bassin accueille, entre autres, le rhinocéros-salle
de bain, le fauteuil-crapaud et les grues lumineuses sous le
regard paisible des chameaux.
Le voici introduit dans le bestiaire inattendu de François-Xavier
Lalanne qui désacralise la sculpture, et plus spécifiquement
la sculpture animalière, en lui octroyant une utilité fonctionnelle.
Artiste artisan, il travaille essentiellement le métal martelé
et s'amuse, ("L'art c'est comme la vie : ça ne devrait pas être
aussi sérieux"), à concevoir, dans la veine du néo-surréalisme,
des animaux à secrets comme la mouche-toilette, le babouin-cheminée,
le gorille de sécurité et le grand chat polymorphe.
Et le rhinocéros, son animal emblématique, devenu rhinocrétaire
ou salon, défile en procession et les sardines surdimensionnées
constituent un bien amusant sofa.
L'univers
de Claude Lalanne est végétal et elle
utilise la galvanoplastie pour immortaliser feuilles et fleurs
en bronze qu'elle utilise comme ornements décoratifs de pièces
de mobilier, de luminaires et de pièces de vaisselle dans la
filiation de l'Art Nouveau, ce qu'elle réfute cependant.
Elle travaille sur le registre de l'empreinte et du moulage qu'elle utilise notamment pour la réalisation de petites sculptures, de bijoux et d'accessoires de mode.
Dans plusieurs salles sont reconstituées des scènes d'intérieur
particulièrement réussies qui donnent à voir les oeuvres réunies
des deux artistes tels une table dressée uniquement des pièces
signées Lalanne avec entre autres, en centre de table-fontaine,
"Le bain des éléphants" et des couverts extraordinairement baroques,
ou les pièces réalisées pour le fameux salon des miroirs de
Yves Saint Laurent.
150 pièces uniques sont présentées pour un vrai voyage enchanté. |