Spectacle
conçu, mis en scène et interprété
Enrico Castellani et Valeria Raimondi.
La Compagnie Babilonia Teatri annonce tout de suite la couleur en se présentant comme une compagnie de théâtre expérimental avec un sacré credo trinitaire : "Pour un théâtre pop. Pour un théâtre rock. Pour un théâtre punk". Aussi son "Made in Italy" résonne-t-il, à la voix et à la musique, tous décibels dehors sur la scène du Théâtre National de l'Odéon en ouverture résolument déflagrante de la 2ème édition du Festival de jeunes compagnies Impatience.
Avec Ilaria Della Donne au son, en maillot de bain taillé dans la bannière étoilée d'outre-Atlantique et Luca Scotton à la régie qui officient à vue sur scène, sur fond d'enchevêtrement de flexibles lumineux pour toute scénographie, Valeria Raimondi et Enrico Castellani, figures symétriques au crâne rasé, quittent, après le cri primal, la posture d'Adam et Eve nus comme le ver qui est dans le fruit sous la pomme croquée d'Apple, pour se placer dans les starting-blocks pour une course effrénée avant l'implosion finale.
De l'Eden perdu à l'envahissement des effigies de Blanche Neige et des nains, ils décryptent et dynamitent la société italienne par une performance proférative basée sur le travail des mots par la voie de l'appariement ou du regroupement, de l'accumulation ou de la déclinaison et l'énumération de structures verbales rudimentaires passées dans le langage commun de tous les préjugés, préceptes, croyances et dérives qui ont envahi, et régissent de manière plus ou moins subliminale, la pensée normative de masse.
Dans leur violence déclamatoire sans affect et leur gestuelle compulsive qui ressortissent à la performance, se retrouvent un des quêtes dramaturgiques que mènent, dans leurs registres et leur univers propres bien évidemment, leurs compatriotes Pippo Delbono ou Emma Dante à laquelle ils impriment une structure non narrative qui fonctionne puzzléique.
Profondément caustique et tragiquement comique, ce spectacle résolument décapant qui ne montre rien et ne raconte donne profondément à voir ce que sont les sociétés postmodernes abreuvées de conformismes sclérosants et saturées d'images détournées. |