Solos interprétés par Eric Domeneghetty, Jaro Vinarsky et Claudio Stellato sous la direction chorégraphique de Karine Ponties.
Simultanément à sa dernière création " Humus vertebra", Karine Ponties présente un triptyque de solos passionnants et enivrants. Passionnants puisqu'ils révèlent les fondamentaux qui soutendent l'élaboration de la pièce principale. Enivrants parce que, tout en étant très synthétiques, ils en dévoilent le sens - la genèse de l'homme et la figure plurisymbolique de l'épouvantail - et laissent deviner la contribution personnelle, dans un travail que Karine Ponties ne conçoit que comme collectif et impliquant pour chacun des protagonistes, la contribution personnelle de trois danseurs-performers au tempérament et à la dramaturgique différents.
Sur des musiques de David Monceau qui a signé avec son post rock à la Mogwaï l'essentiel de la partition musicale, de "Humus vertebra" et le rock déstructuré du collectif canadien God Speed You Black Emperor, qui ici se substitue à Sigur Ros, Eric Domeneghetty, tout en puissance dramatique, Jaro Vinarsky, petit gabarit à la musculature de chat, et Claudio Stellato au corps d'athlète, délivrent respectivement des prestations - qui visuellement convoquent les univers de Bacon, Barcelo et Vedova - aussi singulières que complémentaires pour esquisser le profil de la figure humaine telle qu'elle fût lors de l'enfance de l'homme au cours d'une évolution aussi chaotique et hésitante qu'inéluctable, telle celle qu'est à chaque fois recommencée pour l'enfant de l'homme et signifie le désarroi derrière le rêve.
Le premier, dans ce balbutiement qu'est "Babil", évoque le langage hésitant du jeune enfant mais également, tant de manière allitératoire que par la profération d'une langue composite, l'apparition des langues avec la mythique Tour de Babel, alors qu'il tient encore à peine sur des jambes qui se dérobent, encore engluées dans cet "humus" métamorphique.
Le second, dans "Havran", nom d'une montagne de son pays natal, la Slovaquie, qui retrace l'adaptabilité nécessaire à l'homme tant à la survie qu'à l'évolution, a pour compagnon, fardeau et outil une immense perche en bambou avec laquelle il joue avec une plasticité et une grâce toute féminine dans des arabesques aériennes vertigineuses, se déplaçant sans un bruit, comme porté par le seul le souffle de sa respiration.
Enfin, Claudio Stellato, au nom prédestiné, clôt cette trilogie avec "Fidèle à l'éclair", dans lequel il incarne le figure stylisée de l'épouvantail, dans lequel Karine Ponties voit également la figure de l'homme crucifié, soumis aux aléas des intempéries, qui rêve de liberté et qu'il transfigure dans une performance puissante aussi émouvante que drôle.
Un spectacle virtuose à voir et à revoir pour que Karine Ponties et ses acolytes racontent une fois encore, à leur si belle manière, l'histoire de l'homme |