À l'aube du troisième jour (on dirait un nom de film de Schwarzy), je sens que cela va devenir compliqué. Tous les groupes, tous genres confondus, sont très bons (groupes très connus comme les jeunes pousses). Il va falloir faire des choix, ça va être tendu du slip et très frustrant. Sinon, le temps est toujours aussi merdique. Il fait gris et il y a du vent quand il ne pleut pas. Je vais essayer d'arriver un peu plus tôt et profiter de mon temps libre pour me promener et visiter tous les stands sans qu'il y ait trop de monde.
Le premier concert du dimanche va commencer et il n'y a que de gros nuages à l'horizon mais pas de pluie. La malédiction du premier concert de chaque journée se déroulant sous la pluie est enfin finie ! Wallis Bird arrive sur scène et installe devant sa batterie l'affiche de son concert (affiche réalisée par Pénélope Bagieu). Elle joue une pop-folk très enjouée, c'est très frais et très dansant. Elle est toute petite et toute mimi avec sa chemise à carreaux et sa courroie de guitare arc-en-ciel. Elle se donne à fond, danse derrière son micro et secoue sa guitare dans tous les sens. Elle donne de la voix quand il faut et cela rend sa musique encore plus vivante. C'est vraiment cool et cela remotive pour le reste du festival. Tout le groupe respire la joie de vivre, ils sautillent, dansent et poussent des cris. Visuellement, on ressent la même énergie que pendant les concerts d'Arcade Fire d'il y a 5 ans (quand ils étaient un peu plus foufous que maintenant !). Wallis Bird essaie de faire réagir le public un peu mou et un peu rare (le concert a débuté plus tôt que les autres jours). Ceux qui ne sont pas là ne savent pas ce qu'ils ratent. Moi, je suis en train de tomber amoureux de cette chanteuse et de sa musique entre funk, rock et blues. Sa prestation est de très bonne qualité et elle rivalise, dans mon cœur (et dans un tout autre genre), avec les sets de Skunk Anansie ou de Jello Biafra. Autre signe de coolitude de Wallis Bird, les musiciens de Eels sont venue montrer le bout de leurs barbes devant son concert.
Je traverse le site du festival tout joyeux d'avoir découvert une nouvelle pépite pour aller voir The Temper Trap.
Quand ils sont arrivés sur scène, ils nous en ont mis direct plein la gueule avec des gros riffs de guitare bien dégoulinants. Cela devient plus cool par la suite avec le premier véritable morceau.
Il y a toujours des grosses guitares et un rythme martelé implacablement sur la batterie mais la voix haut perchée du chanteur adoucit l'ensemble.
On pense à du Radiohead mélangé avec du Arcade Fire mais avec une touche très 80's dans les mélodies et dans la façon de placer la voix (rien de péjoratif dans cette remarque, je parle du bon côté des années 80).
Pendant ce concert, je suis rejoint par Milk (leader charismatique de Milk & Fruit Juice et dont j'arrive à placer le groupe dans environ 1 chronique sur 5).
Je lui explique que pour le moment, toutes les avant-Seine de ce festival étaient de très bonne qualité et que j'étais curieux de découvrir Success.
Il fallait bien une exception pour confirmer la règle... Je n'ai vraiment pas aimé Success. Ce que j'en avais écouté sur Myspace était sympa mais en live, je n'ai pas vraiment été conquis. Ils font un gros rock teinté d'electro très énergique. Mais le gros problème c'est que, pour le chanteur, ils ont créé un personnage : Mister Eleganz. Quand on fait ce genre de chose, ça peut être drôle mais n'est pas Ziggy Stardust qui veut !
Mister Eleganz en fait des caisses et c'est très vite relou (le pire, c'est que j'ai croisé Mister Eleganz dans l'espace presse et qu'en vrai, il est très gentil et adorable). Autre point négatif, pendant un des titres, on me fait remarquer que le riff de guitare ressemble à celui du générique de Taratata. À partir de ce moment, c'était mort pour moi ! Je m'attendais à voir débarquer Nagui. Du coup, j'ai préféré partir...
Avec Milk, on s'est dirigé vers le stand Île-de-France (le stand où j'ai volé plein de bouchons d'oreilles pour tous mes concerts de l'année) afin de saluer Mina Tindle qui faisait ses balances son. Comme à chaque fois qu'on se retrouve devant Mina Tindle en concert, on reste hypnotisé par sa voix et on ne se rend pas compte du temps qui passe. Elle s’impose d’abord avec sa voix très belle, puis par ses arrangements tout en subtilité qui donnent à sa musique une grâce toute particulière. Ce petit showcase sur le stand Île-de-France est un petit moment de bonheur et une pépite dans ce festival pluvieux.
Milk voulait ensuite aller voir The Black Angels mais finalement quand on est sorti, le concert de Eels avait déjà commencé...
J'avais très envie de voir Eels, mais je savais qu'il y avait I am un Chien !! en même temps et qu'ils allaient faire une conférence de presse.
Comme c'est le seul groupe français qui avait une conférence de presse à un horaire décent (c'est-à-dire pas en même temps que le concert d'une tête d'affiche) et que j'avais envie de poser des questions à un groupe (histoire de mériter un minimum mon pass presse), j'ai décidé, à regret, de sacrifier Eels.
Je suis resté devant un seul titre : une reprise de "Summer in the City".
Je n'ai entendu que ce titre mais il respirait le blues de barbu.
Entre de l'indie cool et ZZ Top avec une voix à la Tom Waits.
Je suis bien dégoûté d'avoir dû partir à ce moment là...
J'ai donc laissé Milk devant Eels pour aller voir I am un Chien !!.
C'est donc un peu frustré que je me suis retrouvé devant la scène de l'industrie. Ils avaient intérêt à être bons puisqu'ils me faisaient rater un bon groupe sur scène.
Avant d'arriver et pour annoncer la couleur, ils ont lancé une comptine qui répétait en boucle "My dog is better than you".
Ensuite, ça a été une avalanche de gros beats electro et de grosse guitare cradingue. Ils déboulent sur scène avec une attitude 100% rock'n'roll ! Le public est réceptif et danse dans la fosse. Des hôtesses SFR distribuent aux chanceux des premiers rangs des CD du premier EP du groupe (j'en ai chopé un, je le chroniquerai plus tard).
Il y a du pogo un peu partout et beaucoup de mecs qui s'essaient au stage diving. Le chanteur harangue la foule qui répond en hurlant !
Quitte à avoir des gros gros son électro pour danser, j'aurais préféré les voir programmés en troisième partie de soirée, à la place des sets (un peu chiants) de DJ. Cela aurait eu plus de gueule !
C'est electro mais aussi très rock et il se passe quelque chose sur scène... C'est pas juste un mec qui mixe planqué derrière ses platines ! Il y a des grosses basses qui remuent tout sur des rythmes très dansants. Le chanteur de Stuck in the Sound, qui n'est autre que le frère du chanteur d'I am un Chien !!, vient poser sa voix, plus chantée, sur certains titres.
Un rappeur, Real Fake MC, les rejoint aussi pour un titre (qui sera dispo sur le prochain EP). Le son est ultra cradingue, du gros lo-fi maîtrisé. On dirait que Prodigy a tiré un coup de pied dans les couilles des Stooges (ou inversement) et que ce que l'on voit sur scène en est le résultat. Ce n'est pas le meilleur groupe du festival, ni le meilleur set mais c'est une belle découverte et ils ont donné une des prestations les plus rock'n'roll.
Je me fais une petite pause soda et je traverse à nouveau le site du festival pour aller dans l'espace presse pour la conférence de presse d'I am un Chien !! (qu'ils ont enchaînée juste après leur concert). Du coup, je rate Wayne Beckford que je n'avais pas plus que cela envie de voir donc ce n'est pas très grave.
La conférence de presse commence avec un peu de retard et comme je pose la majorité des questions, cela se transforme un peu en interview (mais il faut que je derushe les bandes, donc on verra cela plus tard).
Arcade Fire est annoncé aussi en conférence de presse, je décide donc de rester aux VIP et je rate Beirut (pour le coup, je serais bien allé les voir), et Rox (qui jouait en même temps que Beirut, donc quoi qu'il arrive, je ne serais pas allé la voir même si j'aime beaucoup sa musique).
J'en profite aussi pour rater Fat Freddy's Drop, dont je ne pense rien de mal mais rien de bien non plus !
Je ne pense pas que je vais vous faire de compte-rendu de la conférence d'Arcade Fire, tous les journalistes étaient un peu trop en mode lèche-cul à mon goût. Pourtant, je suis moi-même un grand fan d'Arcade Fire et je suis le roi des lèche-culs ! Je n'avais le dernier album que depuis une semaine, je n'avais pas encore réussi à bien l'appréhender car il est vraiment différent de ce qu'ils avaient fait précédemment.
Du coup, quand j'ai réussi à intercepter le micro pour poser une question, j'en ai posé une bien conne. Le genre de question naze, posée par un gros blaireau, mais qui est chiante car il y a un fond de vérité ! J'ai demandé aux 4 membres présents (ni Régine Chassagne, ni Win Butler), dans un très mauvais anglais, ce qu'ils pensaient quand les gens disaient que U2 était le Arcade Fire des années 80... Moi je voulais poser une question un peu conne, un peu drôle, tout en laissant entendre qu'en l'espace de quelques années, ils avaient créé plusieurs hymnes, qu'ils avaient fait des morceaux qui, intentionnellement ou non, étaient conçus pour être repris en choeur par des dizaines de milliers de gens dans d'immenses concerts (type festival ou stade)... C'est par ce côté, selon moi, qu'ils se rapprochent de U2. Mais ils ont tellement eu peur de passer pour des vantards qui se comparent à U2 qu'ils ont juste bredouillé que U2 avait vendu des millions de disque alors qu'eux n'avaient été n°1 des ventes qu'une semaine et qu'il leur faudrait beaucoup de travail pour atteindre U2...
J'étais content de moi, j'avais posé une question bien pourrie et les regards dédaigneux que certains journalistes me jetaient étaient comme une pluie de bisous en sucre pour moi ! N'oublions pas que tout cela n'est que du rock'n'roll !
Je suis enfin retourné sur le site du festival pour aller voir les Ting Tings. J'attendais beaucoup de ce concert car j'aime beaucoup leur premier album (malgré le matraquage : est-il encore possible d'allumer sa TV et de ne pas entendre une de leurs chansons dans une pub ou illustrant un reportage ?) et que je les avais déjà vus deux fois. Jules De Martino est arrivé tout seul sur scène et il nous a fait l'intro de "We Walk" au piano pour chauffer le public qui tapait dans ces mains (il n'y avait pas trop besoin de le chauffer !). Il a lancé le sampleur pour faire une boucle avec le piano, s'est installé derrière sa batterie et a continué le morceau jusqu'à ce que Katie White arrive. Ils ont ensuite enchaîné, dans les hurlements du public, avec "Great DJ" (tout leur premier album est une mine de singles en puissance). Étrangement, je trouve cela moins fun que dans une salle de concert. Malgré les (environ) 30.000 personnes qui connaissent les chansons par cœur et qui dansent, il y a moins d'énergie que dans des concerts plus intimistes. C'est très bon mais il n'y a pas la magie habituelle de leurs sets. C'est peut-être dû au fait de jouer alors qu'il fait jour.
Comme à leur habitude, ils font venir une section de cuivre sur un titre au lieu d'utiliser des samples comme sur les autres morceaux. C'est quand même fun de faire venir 5 mecs juste pour jouer 30 secondes et ensuite les faire repartir. Contrairement à cette après-midi, le son est réglé nickel, même pas besoin d'avoir des protections auditives et c'est quand même agréable. Le concert est tout de même un peu gâché par les 2 ou 3 relous avec leurs drapeaux bretons (j'aurais dû aller les voir et leur demander ce qu'ils revendiquaient avec leurs drapeaux devant un concert des Ting Tings). Avec l'âge et la fatigue du festival, je deviens de moins en moins tolérant. Heureusement, la sécurité est intervenue rapidement avant que les gens dont la vue était bloquée ne s'énervent.
Les Ting Tings jouent enfin un titre inédit, vivement le prochain album. Je ne sais pas s'il y a un problème technique mais les écrans géants sont descendus derrière les bâches "Île-de-France". Ceux qui sont loin ne peuvent plus rien voir. Il y a aussi des problèmes de sons sur "Shut up and let me go". Katie quitte la scène et laisse Jules faire un petit set de DJ comme il le fait souvent en live. Il s'amuse à balancer des boucles de "Walk this way" d'Aerosmith avec le riff de la chanson titre de "Ghostbuster".
D'habitude, quand il joue en France, il met aussi un peu de Desireless mais on est en festival et on n'a pas le temps.
Je me dis que j'aurais peut-être dû aller voir Wave Machines puis il se met à pleuvoir. Je me réfugie dans l'espace presse pour me mettre au sec et je rate donc Roxy Music.
Je réserve mes dernières forces pour Arcade Fire. Ce qu'ils ont perdu en grandiloquence et mise en scène (orgue géant, décors de néons), ils l'ont retrouvé en énergie comme à leurs débuts. Le public réagit au quart de tour à chaque titre des deux premiers albums.
C'est à nouveau le bordel sur scène comme il y a cinq ans ! Il se met à pleuvoir assez fort et l'eau est projetée par des grosses bourrasques de vent, les écrans géants sont descendus au plus bas tellement ils virevoltent poussés par les éléments (j'en profite pour souligner la très mauvaise réalisation des images diffusées sur les écrans géants du festival : cette année, ils ne se sont pas trop foulés par rapport aux années précédentes, il y a trop de plans de la foule, trop de plans flous, trop de plans de loin).
Le groupe est obligé de s'arrêter de jouer pour des raisons évidentes de sécurité. On voit que le groupe (et notamment Régine Chassagne) est aussi frustré que le public de devoir stopper le show. Après une attente de 5 minutes, le groupe est revenu sur scène pour jouer un dernier morceau, un "Wake up" final sous une pluie battante. C'est donc sur cette note pluvieuse que se termine l'édition 2010 de Rock en Seine.
Cela ne sera pas la meilleure édition de Rock en Seine (étrangement, je garde de meilleurs souvenirs de celle de 2005 avec, déjà à l'époque, Arcade Fire et Queens of the Stone Age). Ce n'était pas non plus mauvais, c'est juste pas de chance de se taper autant de mauvais temps sur 3 jours ! J'espère que l'édition de l'année prochaine aura de grosses têtes d'affiche inédites et une meilleure organisation. En attendant, j'ai découvert plein de groupes assez cool donc je ne vais pas me plaindre de cette édition.
Le problème avec Rock en Seine, c'est que cela se déroule le dernier week-end d'août. Du coup, quand c'est la fin du festival, c'est aussi la fin de l'été... C'est toujours un peu déprimant ! |