Fable comique de Jean-Marie Piemme mise en scène par Philippe Sireuil avec Philippe Jeusette et Fabrice Schillaci.
Une caravane miniature délabrée de l'ère préhistorique du véhicule de loisir, de celle qu'affectionne les voyantes de cirque, et un vieux fauteuil défoncé dans un terrain vague en bord d'autoroute.
Voilà le décor planté par Philippe Sireuil pour les protagonistes d'une étonnante et jubilatoire pièce à deux personnages, dont il assure également la mise en scène, écrite par le dramaturge belge Jean-Marie Piemme.
Sous titré "Sur la nécessité de mordre ses amis", "Dialogue d'un chien avec son maître", se présente comme une impertinente et joyeuse variation qui emprunte à la fable, au dialogue philosophique à la Diderot, aux discussions de comptoir, à la verve néo-réaliste fellinienne et à la figure beckettienne.
Elle met en scène, et aux prises, car c'est à qui dévorera l'autre à moins qu'ils ne fassent un bout de route ensemble, deux forts en gueule, : un homme misanthrope qui se dit chasseur dans un hôtel dont l'uniforme vert pomme le fait ressembler à un Monsieur Loyal d'opérette et dont la vie a pris la tangente et un chien errant doué de parole aux faux airs d'un Charlot doté d'oreilles de cocker qui prend un malin plaisir à provoquer des carambolages sur l'autoroute tout en cherchant une niche.
Jean-Marie Piemme boutique à sa manière le théâtre de dialogue en tricotant le numéro du clown blanc et de l'Auguste, la dialectique du maître et du valet, l'humanité de l'animal et l'animalité de l'homme, pour brosser une satire socio-politique féroce de nos sociétés contemporaines, grattant partout où ça démange.
Armé d'une plume kalahnikov, il arrose tous azimuths la bêtise humaine dans des dialogues vifs et impertinents sous forme de coups de gueule, de coups fourrés et et de coups en douce pour ce drôle d'équipage qui fait assaut de monstruosité et qui profère de petites vérités et de grosses bêtises, à moins que ce ne soit l'inverse.
Le spectacle est dispensé sur un rythme pétaradant qui prend parfois des inattendus chemins de traverse par le duo complice épatant au fort abattage comique formé par Philippe Jeusette et Fabrice Schillaci, respectivement dans le rôle de l'homme et celui du chien campés de manière irrésistible, capables de jouer sur un large registre, du clownesque au poétique.
Don drôle, délicieux et résolument roboratif. |