La saison 2010-2011 commence à Maison Européenne de la Photographie avec deux expositions quasiment antinomyques dans le registre du portrait : le portrait expressionniste avec le néerlandais Koos Breukel et l'autoportrait fictionnel avec la japonaise Kimiko Yoshida.
Sous le titre "Là où je ne suis pas", le commissaire de l'exposition, Jean-Michel Ribettes, critique d'art, a puisé dans les trois séries de travaux qu'elle a réalisées pour composer un panorama d'une oeuvre photographique consistant uniquement en des autoportraits.
Ce s'inscrit dans une démarche déjà connue et balisée qui consiste, pour le photographe, à utiliser son propre corps comme support d'une œuvre d'art. Seules différent, le cas échéant, les finalités. En l'occurrence,
Les autofictions de Kimiko Yoshida : "Mon art ne porte pas sur l’identité, mais sur l’identification"
Cette rétrospective commence avec la série des "Mariées célibataires" réalisée en 2000 et se clôt avec la présentation d'inédits intitulés "Peintures".
Dans ces derniers, elle procède à la transposition symbolique des chefs d'oeuvre de l'Histoire de l'art devenant ainsi par exemple le "Torero" de Picasso qui a été utilisée pour l'affiche de l'exposition ou "La jeune fille souriant" de Vermeer.
La monochromie rend le travestissement plus énigmatique encore comme le Polichinelle de Tiepolo, l'épouse du prêteur sur gages de Metsys ou le Pierrot de Watteau.
Entre temps, cette ancienne créatrice de mode détourne les éléments les plus novateurs et représentatifs du style Paco Rabanne, pour créer d'extraordinaires ornements capillaires.
Ainsi se transforme-t-elle en héroïnes légendaires (Ophélie), en figures mythologiques (Méduse), en divinité tribale ou en créature intergalactique qui sont autant de déclinaisons récurrentes de toiles célèbres notamment de peintres de la Renaissance.
La série des "Mariées célibataires" est sans doute la plus intrigante car, tout en dénonçant la pratique du mariage arrangé au Japon, elle joue sur la dissimulation et la révélation.
Ces photographies de format carré, souvent monochromes, traduisent,par ailleurs, un grand souci d'esthétisme distancié qui confinent parfois à la photographie de publicité sur papier glacé.
Le commissaire de l'exposition, qui est aussi psychanalyste, y voit une forme de contestation féministe. Bien évidemment, ce registre évoque l'oeuvre de la photographe américaine Cindy Sherman, cependant plus radicale, par son exploration des identités plurielles, la critique sociale de la condition de la femme et le détournement de la peinture. |