Comédie dramatique de Theo Van Gogh, mise en scène de Hans Peter Cloos, avec Sara Forestier et Patrick Mille.
Sur l’écran au mur de l’appartement, une scène filmée par la caméra de vidéo-surveillance nous apprend que Pierre Peters, journaliste politique et pas franchement motivé, va interviewer une starlette de séries télé, alors qu’il aurait voulu couvrir l’actualité brûlante, à savoir un remaniement ministériel imminent.
Adapté d’un film de Théo Van Gogh (arrière petit-neveu du peintre), réalisateur hollandais connu pour ses provocations et assassiné par un fanatique islamique en 2004, "Interview" traite des relations entre les peoples et les médias et les similitudes entre people et politique. La pièce illustre également le choc des cultures et le fossé qui se creuse entre la télé-poubelle et l’information, fossé représenté par la rencontre du journaliste et de cette starlette, pure produit de la télé-paillettes, qui dit "je suis regardé par des millions de gens et vous, combien de personnes vous lisent ?".
La pièce est la confrontation entre deux mondes et deux personnages, l’un à la recherche du scoop idéal et elle, lucide sur son statut et enfermée dans son univers superficiel. La mise en scène de Hans Peter Cloos donne à ce huis-clos une tension dramatique qui ne faiblit pas jusqu’au dénouement. L’utilisation de la vidéo, décidément de plus en plus utilisé, se justifie ici. De plus, elle permet de faire oublier un décor quasi-inexistant.
La pièce, qui se perd parfois par manque de crédibilité (pas évident d’adapter un scénario, de surcroit étranger) repose bien évidemment sur l’affrontement des deux comédiens.
Sarah Forestier, déjà dirigé par son partenaire dans un monologue de Proust la saison dernière incarne Katya, actrice à succès de feuilletons de piètre qualité. Dommage que le côté poupée Barbie vulgaire (qui n’existait ni dans le film original en 2003, ni dans le remake interprété en 2008 par Sienna Miller) ait été accentué. Cela n’apporte rien au personnage et le rend même franchement agaçant. Il reste heureusement sa présence scénique évidente.
Quant à Patrick Mille, il nous offre une prestation de haute volée dans un registre inattendu : un personnage complexe au passé trouble et marqué par ses démons. Même s’il a tendance à l"américaniser" parfois à l'excès, son jeu tout en sensibilité est la grande satisfaction de la pièce. |