Comédie dramatique d'après des textes de Jun'Ichiro Tanizaki, mise en scène de
Simon McBurney, avec Kaho Aso, Songha Cho, Eri Fukatsu, Honjoh Hidetaro, Kentaro Mizuki, Yasuyo Mochizuki, Yoshi Oida, Keitoku Takata, Ryoko Tateishi et Junko Uchida.
Simon McBurney a adapté pour la scène et mis en scène sous le titre "Shun-kin" la nouvelle éponyme du monument de la littérature nippone Jun’ichirô Tanizaki en y instillant les préceptes de son traité d'esthétique publié la même année, "Eloge de l'ombre", pour composer un spectacle, joué en japonais surtitré, d'une beauté formelle saisissante.
Sous les lumières très travaillées de Paul Anderson, qui maîtrise totalement le clair-obscur, se dessine, dans le Japon du 19ème siècle, l'univers singulier et vénéneux de Tanizaki, épris de la beauté féminine et explorateur de la dévotion amoureuse qui va au-delà de l'abandon de soi jusqu'à son total annihilissement dans ce récit exemplaire d'une liaison addictive et sado-masochiste entre une jeune femme aveugle, joueuse émérite de luth, et son domestique.
Entourant le très grand comédien japonais Yosho Oida qui incarne le passeur, et accompagnés par le joueur de shamisen Honjoh Hidetaro, les comédiens du Setagaya Public Theatre de Tokyo délivrent une prestation parfaitement encadrée et millimétrée qui ne laisse pas place à l'affect et renforce "l'exotisme" de ce spectacle.
Déclinant subtilement de manière contemporaine le théâtre traditionnel japonais, qu'il s'agisse du No ou du bunraku, tissant une pluralité de niveaux de récit, notamment en introduisant le personnage moderne d'une actrice qui vient lire le texte en parallèle avec le récit du narrateur, usant de moyens d'une simplicité absolue, une écuelle et un bambou pour créer une source, une feuille de papier pour symboliser l'envol d'une alouette, Simon McBurney transporte le spectateur dans un autre espace-temps source d'une émotion intellectuelle et esthétique aussi rare qu'envoûtante.
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