Les écrivains français, encore plus lorsqu’ils sont historiens comme l’auteur Claude Mossé, pensent que leurs compatriotes sont aussi érudits qu’eux. Ce qui est très flatteur, certes, mais malheureusement assez loin de la réalité. Surtout lorsqu’il s’agit d’une de ces périodes troubles de notre Histoire, comme les guerres de religions qui déchirèrent la France au XVIème siècle, qui sont le contexte du roman Catherine, Nostradamus et le triangle noir.
En effet, à part le massacre de la Saint-Barthélemy (le 24 août 1572) et Isabelle Adjani – pardon La Reine Margot romancée par Alexandre Dumas – la seconde partie du XVIème siècle est quelque peu floue dans notre mémoire collective. Alors un petit rappel historique avant d’aborder la lecture de ce roman s’impose.
Tout d’abord les protagonistes. La Catherine dont il est question ici, est Catherine de Médicis. Italienne, fille de Laurent II de Médicis (à qui Machiavel dédia son livre Le Prince), elle épousa le futur Henri II et devint reine de France en 1547. Mère des rois François II, Charles IX, Henri III et des reines Elizabeth d’Espagne et Marguerite (la fameuse Reine Margot donc), elle fut une figure controversée de son époque, à la fois épouse bafouée, régente à la mort de son époux, mécène, et partie prenante dans la guerre entre catholiques et protestants.
Nostradamus n’est plus à présenter, tant ses Prophéties sont encore aujourd’hui sources de gloses et de débats. Peut-être médecin, à coup sur astrologue, il fut reçu à la cour par Catherine, cela est attesté. Voilà pour la partie historique du roman, la partie qui fait dire à l’auteur que dans son ouvrage : "si rien n’est faux, tout n’est pas vrai".
Et c’est avec le "tout n’est pas vrai" que commence le roman. Des complots, de mystérieux personnages, des chevauchées, des rendez-vous secrets dans des tavernes obscures, l’intrigante à la sulfureuse beauté… Bref, tous les ingrédients pour faire un formidable roman d’aventures sont réunis. Mais on peut avoir les meilleurs ingrédients et suivre à la lettre les instructions, la réussite de la recette n’en est pas pour autant assurée. Et c’est malheureusement le cas ici, de ce livre qui s’adresse à des lecteurs qui ont déjà non seulement une solide culture historique, mais aussi une imagination débordante, tant les détails et explications sont parcimonieux, et l’action brouillonne.
Et cela est dommage, car ces derniers temps de nombreux auteurs étrangers se sont approprié notre Histoire et ses innombrables mystères. Qu’un auteur français se mette enfin à ce genre historico-ésotérico-policier est une bonne chose. Malheureusement, nous avons encore à apprendre des auteurs étrangers le sens de la didactique qui rend accessible à tous même les plus compliqués des épisodes historiques. Donc, même si l’objet de ce roman est attractif, sa lecture est à réserver à des spécialistes de la période ou être accompagnée d’une solide révision de la seconde moitié du XVIème siècle. |