Comédie dramatique adaptée et mise en scène par Marc Dugain d'une nouvelle éponyme de Anton Tchekhov, avec Jean-Pierre Darroussin, Alice Carel, Gabrielle Forest, Michel Bompoil et Adrien Bretet.
Marc Dugain, auteur à succès de "La chambre des officiers", a adapté pour le théâtre la nouvelle de Tchekhov, "Une banale histoire".
Dans cette nouvelle écrite peu de temps après l'échec de "Oncle Vania", et avant les succès théâtraux qu'il connaîtra avec "La mouette" ou "La ceriseraie", il exprime à travers les propos de son personnage principal, à la fois son amour pour les lettres et sa défiance envers la représentation théâtrale. "Quand une pièce est bonne, pourquoi mobiliser des acteurs ? Autant la lire."
Ce personnage, Nicolaï Stepanovitch, est un éminent savant russe, qui passe de longues nuits d'insomnie à attendre que le temps passe en écoutant les bruits de la maison. A l'approche de la mort, il n'hésite plus à afficher une liberté de penser et d'agir au mépris des conventions. Il passe beaucoup de temps avec Katia, sa pupille, jeune femme cultivée à la réputation sulfureuse. Katia, pourtant célibataire, a jadis perdu un enfant. Cette proximité avec la mort crée une complicité entre ces êtres.
Après le drame, Katia a décidé de mener sa vie en fonction d'une passion, le théâtre. Avec elle, Nicolaï Stepanovitch peut parler des joies intenses que la vie lui prodigua à travers la science, l'enseignement, le théâtre et les lettres. Il peut aussi lui avouer en quelle piètre estime il tient les membres de sa famille et leur besoin de maintenir le paraître d'une richesse et d'un statut social auxquels ils ne peuvent désormais plus prétendre. Ils peuvent se montrer l'un à l'autre tels qu'ils sont et n'ont pas besoin de cacher leurs faiblesses.
Dans le rôle de Nicolaï Stepanovitch, Jean-Pierre Darroussin, grand amateur de Tchekhov dont il a déjà interprété plusieurs personnage sur les planches, traîne sa carcasse, avançant par petits pas, les bras ballant le long du corps. C'est d'une voix douce qu'il exposera, au fur et à mesure de la pièce, ses réflexions acides sur ses contemporains. Il interprète avec subtilité ce personnage à la fois revenu de tout mais habité d'une douce ironie. A peine peut-on lui reprocher des mains qui jamais ne tremblent alors que tout son être est affaibli.
Dans le rôle de la femme de Nicolaï Stepanovitch, Gabrielle Forest compose un personnage tout à fait crédible, entre inquiétude et lassitude. Il est par contre dommage que le personnage de Katia, interprété de manière convaincante par Alice Carel, ne soit pas plus étoffé.
En effet, dans l'adaptation de Marc Dugain tout tourne exclusivement autour du personnage de Nicolaï Stepanovitch omniprésent sur le plateau. Sa mise en scène très académique, ainsi que les sobres décors, une immense toile représentant un paysage en fond et quelques meubles, renforcent l'impression d'une pièce entièrement portée par un Jean-Pierre Darroussin.
"Quand une pièce est bonne, pourquoi mobiliser des acteurs?". Parce que c'est un plaisir de voir un comédien de la trempe de Jean-Pierre Darroussin se fondre avec autant de talent dans un personnage. |