Réalisé
par Raffi Pitts. Iran/Allemagne. Drame/Thriller.
Durée : 1h32.
(Sortie le 16 février 2011). Avec Rafi Pitts, MItra Hajjar, Ali Nicksaulat, Hassan Ghalenoi et Manoochehr Rahimi.
Quand on parle cinéma iranien, on pense tout de suite au cinéma post-bressonien d’Abbas Kiarostami et de ses élèves comme Jafar Panahi.
Mais les temps changent, il semble que le cinéma de Kiarostami qui n’arrêtait pas de chercher et de rechercher où était la maison de son ami soit enfin en fin de course. Et puis, en emprisonnant Panahi, les autorités iraniennes ont peut-être contrevenu aux sacro-saints droits de l’homme mais ont rendu un fier service à bien des cinéphiles...
Voilà désormais la piste dégagée pour que le cinéma iranien s’inscrive différemment dans le cinéma mondial. La proposition de Rafi Pitts, avec "The hunter", ravira les amateurs de cinéma B américain, étonnera ceux qui n’imaginaient qu’au pays des mollahs pouvait éclore un cinéaste influencé par Monte Hellmann, Abel Ferrara et les productions de Roger Corman.
Si on se moque du contexte, Rafi Pitts réussit ici un quasi thriller, un film d’atmosphère policière sec, nerveux, rappelant des petits films américains de la trempe de ceux qui sont considérés vingt ou trente ans après leur sortie comme des grands films.
Donc, pour gagner du temps, il faut immédiatement affirmé que "The hunter" est un grand film. On y voit un homme seul, jouet de la grande histoire, passer de chasseur à chasser dans un climat oppressant, crépusculaire. L’homme mutique, joué par le réalisateur lui-même, porte en lui une colère infinie qui ne peut s’extérioriser que par un acte dérisoire, absurde, nihiliste, la mort est son seul rendez-vous possible.
Et, à l’instar des films américains auxquels il se réfère, il faut s’en prendre d’abord à la fatalité pour que tout ça finisse tragiquement. Dans "The hunter", la fatalité prend la forme d’horaires décalées entre Ali, le veilleur de nuit, et sa femme.
Le spectateur découvrira aussi avec intérêt que la vie à Téhéran n’est pas si différente que la vie à Paris ou à New York. Surtout quand on la décrit en suivant les périples d’une Ford Mustang sur une autoroute.
Alors que souvent ce genre de films paraît d’abord destiné au spectateur occidental et se plaît à lui fournir de quoi conforter ses préjugés ou à lui répéter à l’envi les lieux communs qu’il adore entendre, "The hunter" veut d’abord convaincre le spectateur iranien sur les thématiques développées. Il y découvrira par exemple une police emprunte au doute et divisée sur le rôle qu’on veut lui faire jouer.
Tout cela est évidemment dit avec une économie de moyens propice à de belles ellipses. Bref, "The hunter", c'est d’abord du très bon cinéma qui, mine de rien, réconcilie Hollywood et Téhéran et montrera à ceux qui feignaient d’en douter que les hommes là-bas sont de la même essence que ceux d’ici. |