Texte de Jean Genet, mise en scène de Julien Fišera, avec Pierre-Félix Gravière et mise en scène de Cédric Gourmelon, avec Raoul Fernandez et Antoine Kahan.
Quasiment en ouverture d’une saison écourtée, Patrick Gufflet, directeur du Théâtre Paris Villette propose deux spectacles en miroir, qu’il envisage comme une traversée au sein d’une œuvre, pour une variation autour d’un texte de Jean Genet, "Le funambule".
Ecrit en prose poétique, ce texte, qui revêt la forme d’une lettre destinée au vrai funambule qu’est le compagnon de Genet, aborde, sur fond d’ode à l’amour visant à "enflammer" l’amant acrobate, plusieurs thématiques tenant notamment au processus de l’acte créatif et à la posture de l’artiste tout en composant un essai de dramaturgie comparée entre le théâtre, le cirque et la danse.
Texte complexe à porter sur la scène et les propositions très travaillées de Julien Fišera et Cédric Gourmelon ressortissent à la même focale sur le verbe d’un texte qu’ils entendent comme initiatique tout en s’inscrivant dans une approche esthétique différente qui toutefois écarte l’incarnation propre à ce qui est aussi un chant d’amour très charnel.
Julien Fišera, pour qui ce texte est avant tout "un traité dialogué qui se fait théâtral", le situe dans le registre de "la théâtralité de l’apparition" comme devant être porté par le comédien hors de toute représentation illustrative, pour s’immerger dans ce qu’il veut être "une traversée sensorielle, parcours physique dans un poème",
Dans un espace d’un blanc irradiant avec un ciel-dais tendu en ligne de fuite conçu par Virginie Mira, la partition totalement désincarnée, délivrée sans faille par Pierre-Félix Gravière, nécessite tout autant de concentration intellectuelle que de qualité d’écoute, voire de connaissance préalable du texte.
Pour Cédric Gourmelon, le texte de Jean Genet est une invitation à une célébration qui passe par une métonymie de l’univers du cirque, avec la scène recouverte de sable fin et exposée sous le feu nourri d’une rangée latérale de projecteurs à la luminosité croissante, métaphore du fil, près duquel se tient, immobile, le funambule (Antoine Kahan).
Le rôle de maître de cérémonie échoit au comédien salvadorien Raoul Fernandez, lui aussi souvent immobile, comme pétrifié, qui lui apporte une coloration douloureuse. |