Elle avait commencé sa carrière en 1996 par une reprise de l’improbable et kitschissime "Are ‘friends’ electric ?" de Gary Numan & Tubeway Army (que l’on peut retrouver sur l’album Tribute Random) – comment alors supposer qu’An Miel Mia Pierlé livrerait en 2010 un album de pop sage et propre sur elle, jouant dans la cour de Kate Bush et Tori Amos, d’une Patti Smith qui se présenterait à l’Eurovision avec un titre signé Alice Lewis (ou vice versa) ?
Pour son quatrième album studio, le deuxième en compagnie du groupe White Velvet, la chanteuse et compositrice belge confirme ainsi qu’elle est devenue femme – et même : mère, c'est-à-dire tout à la fois responsable et respectable. Le disque a d’ailleurs été enregistré alors que la jeune femme était enceinte pour la première fois ; il a également trouvé son point de départ dans un jeu de composition : Koen Gysen (le compagnon d’An Pierlé, qui s’avère aussi être son producteur et le leader du White Velvet) étant absent une semaine, An Pierlé s’est amusée sur son invitation à écrire chaque jour un morceau nouveau, jetant ainsi les bases de ce qui deviendrait Hinterland. Un disque familial, en quelque sorte.
Pas de mystère, donc, à ce que cet Hinterland soit vierge de toute violence, de toute négativité. A l’extrême opposé de la ravageuse chanson de Shannon Wright qui porte le même nom. Parfaitement évanescent. Un album d’une grande simplicité pop (ce qui ne doit pas rimer avec "pauvreté"), aux compositions très directes et reposant sur un format "chanson" très reposant, où la trinité basse-guitare-batterie a un peu volé la vedette au piano, instrument fétiche d’An Pierlé. Un album narratif, pourtant, aux lignes mélodiques parfois déséquilibrées mais toujours entièrement mises au service de la voix acrobatique de la chanteuse – c’est attendrissant comme une naissance dans un foyer heureux ; pour la transgresssion, les larmes, les cris et la sueur, pour la créativité débridée et une certaine soif d’art, on repassera dans quelques années. |