Le math-rock aura-t-il déjà si bien porté son nom ? The Pattern Theory, le groupe, tire le sien des travaux d'Ulf Grenander, éminent mathématicien contemporain ayant formulé une théorie de la reconnaissance des formes faisant encore autorité dans le domaine, notamment, de la recherche en intelligence artificiel. C'est dire.
Comme toutes les formations du genre, The Pattern Theory propose une musique d'une grande complexité. Quelque part du côté de Tortoise, d'un Dilute au beau fixe, d'un Don Caballero passé à la verveine. Mais le trio ne donne pas dans l'affectation technicienne, dans l'autisme instrumental et la virtuosité rythmique gratuite, loin de là.
Les compositions de son premier album, éponyme, dégagent à l'inverse une étonnante impression de simplicité, qui ne tient pas qu'au dépouillement des sonorités et à leur densité particulièrement peu élevée. C'est que les compositions tournent souvent autour du principe, très jazzy, de la variation sur thème – les variations étant ici d'une précision micro-métrique, toute la richesse résidant dans le détail. Le plus épatant dans cette histoire étant certainement que le disque n'est jamais ennuyé, gratuit, affecté, ce que quelques lignes critico-descriptives auront toujours du mal à faire bien sentir.
À ce titre, et également pour les sonorités propres à l'album (où les vibraphone et xylophone tiennent une part importante), on songera surtout au Triosk de l'album The headlight Serenade, autre album de valeur, qui avait permis, en son temps, de réhabiliter la "musique d'ascenseur" en lui donnant une valeur quasi métaphysique. On n'en dirait pas moins de ce Pattern Theory, qui opère le même renversement : d'une musique que les mauvaises oreilles croiraient faite pour meubler nos petits temps perdus, faire une invitation au voyage (intérieur), exigeante et généreuse. Quelque chose d'un changement d'échelle, tout simplement : aller entendre au plus près des choses minuscules, zoomer, s'approcher, en mode macro-musical. |