L'histoire prend place dans un futur proche ultra-libéral où toute création artistique a pratiquement disparu pour laisser place à Mundial Musique, la seule maison de disque légale. Mundial Musique qui impose son monopole avec l'aide du gouvernement pour mieux assommer les masses à grand coup de musique pop édulcorée chantée par des bimbos aussi éphémères que refaites.
Anna, Joshua et son frère Nathan décident de se rebeller contre le système et de monter un groupe de rock nommé Debaser (en référence à la chanson des Pixies) pour essayer de réveiller la France et détruire Mundial.
Dans le dernier tome, les responsables de chez Mundial se sont rendus compte que le rock plaisait aux adolescents, et décident alors d'en faire un phénomène de mode, pour pousser la jeunesse à consommer. Un tournoi est organisé pour trouver un groupe de rock susceptible d'être produit par Mundial. Les membres de Debaser décident d'y participer, pour infiltrer Mundial et tenter de se servir des armes de l'ennemi pour faire connaître leur musique au plus grand nombre.
C'est toujours compliqué quand des français se mettent à créer dans un style particulier qu'ils ne maîtrisent a priori pas. Par exemple, en France on a du mal à faire des films de genre qui ne fassent pas téléfilms ridicules. Pareil pour les séries TV : combien de policiers du jeudi soir sur TF1 pour arriver un jour au niveau du doigt de pied d'une série US ? Alors que penser du manga français ? En fait, on peut en penser du bien. Alors forcément certains éditeurs tentent de s'y mettre et font de la merde. Mais il y a quand même des manga français qui valent le coup et Dabaser en fait partie.
Déjà Debaser emprunte le format manga et une certaine forme de narration typique des shônen, mais ce n'est que sur la forme, le fond n'est pas que manga. Le style graphique a un côté un peu crade et dessiné comme dans l'urgence, donnant une certaine dynamique aux dessins. On est à mi-chemin entre le charadesign du jeu vidéo Jet Set Radio et des comics indépendants américains. L'action est clairement shônen avec des héros qui évoluent, découvre de nouveaux pouvoirs (oui, dans cette BD, les vrais musiciens ont des pouvoirs étranges qui se manifestent lorsqu'ils font de la musique) et doivent se surpasser pour affronter des ennemis toujours plus forts, mais l'humour est très européen.
Il ne faut pas se laisser rebuté par le côté un peu manichéen des gentils artistes contre le grand capital qui veut les exploiter, car il y a beaucoup de second degré et d'autodérision. L'humour est très présent et fait beaucoup penser à un One Piece franchouillard et sexuel. Puis c'est une putain de BD rock, dans le style, le sujet et les multiples références. On sent que ce n'est pas une posture et que l'auteur est une vraie fan de rock !
Debaser est un hybride plutôt réussi entre manga, BD indé US, fanzine punk, un peu de cul et du rock des années 90. Une BD pleine d'humour où l'auteur a réussi à s'approprier certains codes du manga pour nous les renvoyer dans la face en beauté. Une série de BD à suivre de près... |