Pièce
de Claude Bourgeyx, montée par Bastien Duval avec Bernadette
Lafont
Ecrits d’amour n’est pas un texte dramatique au sens
conventionnel du texte. La couleur vient plutôt du rythme
imprimé par ces historiettes tragi-comiques qui sont contées
en deux lettres, la lettre envoyée et la réponse,
format qui se prête fort bien à la lecture par l’acteur.
L’amour impossible est le pivot des lettres. Claude Bourgeyx
s'en sert alternativement comme une amorce, un rebondissement ou
une chute. La langue est sobre, belle, raffinée, même
quand l’épistolier est de condition modeste, et le
style pur, dépouillé.
Les destinées, ordinaires, absurdes, cocasses et parfois
rêvées, se croisent comme les missives, qu'il s'agisse
de la vaine demande en mariage du papet, du fantasme de la voyeuse,
du manque d’amour filial, du voyage de noces en solitaire
ou du foetus teigneux.
Bastien Duval a réussi une mise en scène très
cinétique, un noir, une voix off, une musique, quelques rares
accessoires et une mise en espace de la comédienne qui, donnant
l’illusion d’une alternance de gros plans et de plans
larges, permet à celle-ci de prendre l’ascendant sur
le spectateur subjugué, pour lui livrer ces lettres, ces
écrits, ces cris d’amour qui vont lui transpercer le
cœur et l’âme.
Ce spectacle, basé sur la subtile empathie avec le public,
se joue sur le fil du rasoir. Et celle qui va essuyer le tranchant
de la lame, c'est Bernadette Lafont qui, telle une vestale janusienne,
réussit une très belle performance. Son oeil qui pétille,
son phrasé qui sait se faire tendre ou coupant, ses mains
qui remontent un col, suffisent donner vie à la belle captive,
à la mère distante ou au clown. Seule en scène,
elle passe de l'une à l'autre, sans faux pas, en nous captivant.
La fiancée du pirate est tout simplement une remarquable
comédienne. Ne la ratez pas !
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