Une plume, un bon vieux HB avec la petite gomme au bout et des feutres. Ça fait donc un scénariste, un dessinateur et un coloriste (tu fais quoi dans la vie ? Des coloriages ! Cool…). Et derrière ces jolis métiers : Sol Hess, Laureline Mattiussi et Isabelle Merlet. Et leur bébé : La Lionne, bande dessinée (et coloriée !).
L’histoire est en trois volets, je n’en ai que deux sous la main, mais il me semble avoir de quoi me faire une opinion totalement subjective. La Lionne est une courtisane romaine de l’Antiquité. Et si vous ne pensez pas à la suite, vous avez l’esprit tordu : le contenu est nécessairement orgiaque, turgescent (ou en panne), la bagatelle, le lupanage, la lutinerie, la bouillave, le coït, le chafouinage, le grivois, le forniquage, le désenclavement de péninsule, les sprints d’unijambiste, le bivouac dans la crevasse… tout y est, en long, en large et en travers. Sans inutile fausse pudeur.
Tome 1 : Pedicabo ego vos et irrumabo : "Je vous enculerai et me ferai sucer". Tome 2 : Odi, Amo et excrucior… euh… exécution amour et… euh… J’ai arrêté le latin.
Rome est décadent, les papes mourant boivent du sang de nouveau-né, la Lionne est la reine de la baise, et propriété de Catulle qui la loue pour un an (moyennant une coquette somme) à Publius. Léa la Lionne est même un sacré remède pour Samuel, triste hère en panne. Mieux que le viagra cette femme. On se l’arrache.
Oui mais pas de bol, Publius tombe raide dans sa gamelle, Léa est sur le champ accusée d’empoisonnement, et doit fuir. Il faut dire que les susceptibilités sont exacerbées par une épidémie de peste, Léa la riche courtisane courtisée est le sujet de bien des jalousies. Samuel et elle fuient la ville et rencontrent un vieux schnock dépravé et certainement fou, qui se prend pour César, Jules, Le Grand, L’Auguste. La suite, je vous laisse la croquer à pleine bouche (fais gaffe avec les dents quand même).
Le dessin maintenant. Le trait est franc, simple, sans fioriture, les visages sont ovales, les yeux en amande ou rond comme des ballons, les plis des drapés partout, des seins, des sexes, des poils… Tout y est. Sobre et efficace, avec sa propre personnalité, présentant une réalité impudique et grivoise.
La palette des couleurs est à l’image du trait : les tons de jaune-orange-rouge très utilisés. Pas de rayons de soleil, ni de jeu d’ombres et de lumière pour exprimer la profondeur de l’image, les peaux passent du jaune au marron, et du rouge au verdâtre.
Les bulles sont équivalentes aux images/couleurs : efficaces et directes. Seuls quelques mots suffisent à exprimer ce que le dessin ne montre pas.
Conclusion ? Un bel ouvrage que voilà, avec sa marque de fabrique et un trait identifiable entre tous dans le vaste monde de la BD. Hormis le fait que je ne mettrais pas les BD entre toutes les mains, le trio d’auteur a créé son univers sans préliminaire, un tantinet brutal, cru, direct, et adroit. Puisque sans asservissement dégradant pornographique. |