Retour réussi d’un des musiciens Français les plus talentueux après presque dix ans d’absence en solo.
Ma première expérience sonore avec Rodolphe Burger date d'une nuit d'insomnie de 1996 où, casque vissée sur la tête je balayais les fréquences FM en quête d'un peu de musique, pour finir par tomber sur un live de Kat Onoma, période Far From the Pictures. J'étais resté scotché de bout en bout par ce son singulier et ce style inimitable, jusqu’au classieux "The Radio" qui clôturait ce soir-là l’exercice.
Depuis cette délicieuse claque musicale, je continue de suivre avec fidélité les pistes parfois chaotiques de l'insatiable esthète, tracées en solo, jamais très loin de ses ex-acolytes ou au gré de ses multiples collaborations et projets.
C'est une fois de plus le cas : suite à son expérience jazzy dans l’ombre de Fred Pallem et de son spectacle en hommage au Loner Neil Young Never Sleeps, il revient avec son cinquième album solo après No Sport et Valley Session en 2008 et 2009 (déjà…). Co-réalisé avec le musicien Vaudois Christophe Calpini rencontré chez Bashung, au fil de résidences de création successives, Good ne dénote pas dans la riche discographie de Burger. Il s’en dégage toujours la même atmosphère intimiste, construite autour de ces extraits de voix amplifiées se noyant dans un patchwork sonore où la guitare mène la danse. Bref, tous les éléments qui font qu’on adore ou déteste ses productions (à l’exception près de la pochette jaune paille, pas des plus réussies, qui présente une couronne écrasée au sol nous rappelant, entre autre symbole, que l’Epiphanie est derrière nous).
Rodolphe Burger et ses compères étalent leur classe tout le long de ces douze morceaux souvent minimalistes, dont la variété de styles reflète bien le processus de création. Alternant l’Anglais (ah cet accent so Frenchy), le Français (et même un peu d’Allemand sur "An Der Lili"), soufflant le froid (l’inquiétant "Good" d’ouverture, le dérangeant "Painkiller" aux paroles provocantes) et le chaud (l’entêtant "Happy Hour" et son orgue vintage de fête foraine), l’Alsacien promène avec aisance ses textes ciselés, souvent susurrés (le magnifique "Poème en or"), criés parfois (sur l’électrique et rageur "Fx of Love" nous ramenant aux belles heures de "Billy the Kid"), sur fond de mélodies cabossées.
L’histoire se termine en douceur avec un "Lenz" conté, lorgnant du (bon) côté de chez Michel Cloup. Un bric-à-brac d’influences et d’ambiances un peu déconcertant mais qui s'apprécie sur la longueur. Calme, sensualité, sérénité : en ces périodes troubles, cette force tranquille fait du bien. So Good !