La difficulté dans l’interprétation des œuvres de Bach est de vouloir toujours en rajouter autant dans un classicisme anachronique quand dans un ascétisme de mauvais aloi alors que justement ces œuvres se suffisent à elles-mêmes. Oublier presque le subjectif (et les effets de mode), respecter simplement le texte en y ajoutant juste ce qu’il faut de couleurs et de sa propre âme de musicien, Vladimir Ashkenazy l’a compris depuis très longtemps.

Les six Suites françaises par Johann Sebastian Bach sont un véritable élixir de vie. Le compositeur Allemand a commencé à composer ce cycle en 1720 pour sa femme Anna Magdalena alors qu’il était musicien à la cour de Köthen.

Les Suites françaises font partie des trois grands cycles de six danses pour le clavier, avec les partitas et les Suites anglaises. Elle se composent des quatre danses : allemande, courante, sarabande, gigue, auxquelles on peut y ajouter entre la sarabande et la gigue : menuet, gavotte, air ou bourrée, dont l’ordre trouve son origine en France, d’où le nom choisi par Bach. Ces suites, souvent considérées d’un intérêt moindre par rapport aux suites anglaises ou aux partitas, portent une multitude d'humeurs, de tempos et de couleurs en elles. Trois de ces suites sont en mineur et sont marquées par la mélancolie et des tons sombres. Les trois autres suites dégagent une lumière éclatante.

Vladimir Ashkenazy y montre sa profonde compréhension du langage musical de Johann Sebastian Bach. Tout comme dernièrement Murray Perahia chez DG, il évite toute tentative d’imitation du clavecin (avec une utilisation moins systématique de la pédale), assumant pleinement le choix du piano. Son jeu est brillant et incisif, avec une articulation claire et une profondeur intellectuelle qui n'interfère pas avec une certaine chaleur sonore. Le pianiste Russe avec notamment une main gauche toujours affirmée offre une fluidité des notes, un sens des lignes mélodiques et rythmiques (hémioles…). Sans atteindre les sublimes versions de Richter ou Koroliov, ces suites Françaises méritent une écoute attentive.