Comme les célèbres cochons, ils sont trois, mais le grand méchant loup ne rêve pas de les croquer… Quoique… Bercés de bouchons et de rues à la propreté douteuse, Niki Niki évoque une immensité venue d’ailleurs que la ville Lumière leur a certainement inspiré.

Mystérieux comme un échange de mallettes, suspect comme le badaud derrière ses besicles, nonchalant comme l’accent gainé des autochtones, Absence est leur premier album. Vous y trouverez des claviers à profusion, entre vapeurs et percussions électroniques.

La voix principale est féminine, Mélodie Orru est envoûtante, un genre de pieuvre Steam punk, souples tentacules sous un scaphandre d’acier. Ses deux acolytes sont le yin et le yang du groupe, le chauve et le chevelu accordent leur présence au charisme vocal de la chanteuse, tantôt en titillant les instruments, tantôt en distillant des soubresauts linguistiques au cœur des titres, tantôt onomatopées tantôt murmures. Le mélange est une ivresse électronique assez floue qui envole les sens sur la stratosphère des limites visuelles ("Ungenderness").

Joyeusement pop, Niki Niki atteint la grâce de la musique électronique, en redonnant une élégance aux sonorités surannées des jeux vidéo des années 90. Entre lyrisme et poésie, des échos se répercutent jusqu’au cœur des sens, tels les cercles concentriques s’élargissent d’un point central jusqu’à clapoter sur les plages.

Musique digitale révélatrice d’émotions tactiles, Absence dessine des paysages aux graphismes pointus et précis. Niki Niki a de la magie dans son chapeau et des rêves dans ses morceaux. Jouant des notes au premier degré, les étirant jusqu’à la lie de leurs derniers scintillements, le trio pousse les limites des instruments aux confins de ce qu’ils ont dans le ventre.

Le résultat est un album résolument électro pop, carrément onirique, obstinément hypnotique, franchement sensible. Inspirant.