Près de vingt ans après la sortie du premier album, l'un des projets de Laurent Perrier donne naissance à un nouvel album, presque parallèlement à la sortie du quatrième album de Heal, autre projet de ce créateur aux mille doigts dans la prise. Il faut le voir jouer Live pour comprendre cette métaphore absurde, lui qui évolue au milieu de dizaines de connexions et de modulations tarabiscotées.
Le premier réflexe, à l'écoute de la musique de Zonk't serait de tout rapprocher d'Autechre. Mais le raccourci serait aussi réducteur qu'inapproprié. Si on peut en effet y voir certaines accointances, la première écoute de la musique de Laurent Perrier suffit à se convaincre qu'elle n'appartient qu'à lui et que les influences sont aussi multiples que digérées. Les raisons de cette digestion sont nombreuses, à commencer par le nombre des années. En effet, depuis vingt ans maintenant que Laurent Perrier évolue, il a largement su façonner son identité et n'a rien à prouver de ce côté. Sa musique, plus pénétrante et moins abstraite inclut une notion essentielle la plupart du temps absente de chez Autechre, le rythme.
Si l'album débute sur un drone flottant bien plus riche harmoniquement que le style minimaliste qui sert de référence, un glissement de terrain particulièrement sombre s'opère alors, transitant lentement vers une forme de dark ambiant oppressante où la danse s'installe au compte-gouttes. Une, puis deux, puis trois pulsations, puis la basse allonge son contre-pied, les sonorités s'étirent, puis s'épurent lentement, et comme me l'a habilement décrit Bernard, disquaire de son état chez Souffle Continu, je cite "un dub rampant" vous hypnotise alors. Les notes se font rares mais se prolongent copieusement au fil d'une réverbération digne d'une piscine olympique. Le sous-terrain qui s'installe alors, fait de sonorités synthétiques et concassées, vous embarque dans une sorte de rave party au fond des catacombes parisiennes, comme on peut encore en croiser parfois. La musique électronique, souvent répétitive par essence, est ici en perpétuel mouvement, sans cesse à la recherche de nouvelles textures, et pas un beat ne ressemble au précédent, ce qui rend ce premier morceau d'autant plus passionnant qu'il vous tient en haleine du début à la fin.
Le second voyage qui nous est proposé est tout aussi dépaysant. C'est la basse qui tient la barque rythmique en premier lieu, pour un morceau plus minimaliste, où les sons électroniques arrivent de partout, s'entrechoquant, comme autant de moments aléatoires pour une musique qui n'est en rien hasardeuse. Si cette seconde face débute sous des expérimentations plus poussées, la suite donne à se régaler, la pulsation s'imposant peu à peu, toujours décorée par ces sonorités élastiques et froides dont les fondations s'engouffrent dans les profondeurs d'une basse ronde, ronflante, comme un dub de cold wave.
Laurent Perrier parvient presque à nous faire danser dans un décor abstrait dénué de repères, entre la musique de Pierre Henry et les figures enfumées des premiers Scientist. Une réussite totale, pour un disque de musique électronique pure, avec ce parfum divin d'une scène française toujours prompte à relever le gant pour rappeler au reste du monde que nous ne le sommes pas, en reste.
Zonk't sera en concert à Paris le 20 septembre 2018 dans le magasin Modularsquare (47 rue Sedaine, 75011 Paris).
Le printemps, les giboulées de mars, les balades au soleil ... la vie presque parfaite s'il n'y avait pas tant de méchants qui font la guerre. Pour se détendre, cultivons nous !. Ajoutons à cela nos chaines Youtube et Twitch et la semaine sera bien remplie.