Slovène, Tomaz Lavric TBC envoie une BD chargée de punk et de doigts tendus bien hauts. Semi autobiographique, Alerte rouge fait mal aux couettes et refile un coup de vieux à plus d’un paternel.
C’est l’histoire de Youri, la quarantaine bedonnante, une femme charmante et un ado qui "s’habille comme un épouvantail, parle comme un débile mental" se lamente celui qui fut un punk-fuck en son jeune temps. Il était La Taupe, blouson de cuir, bière union et bottes militaires usées issues des rebuts de l’armée populaire yougoslave.
Un ancien compère de scène fait refluer en lui les remugles nostalgiques de sa jeunesse dans la Slovénie de l’ancienne Yougoslavie des années 80. La défonce, les filles et la frénésie du punk. "Ce qui était important, c’était le look et la pose. Et la musique… oui, bon, c’est bien de faire un morceau avec quelques accords, mais rien que le bruit est déjà en soi une soupape qui permet de libérer toutes les frustrations, les colères et les hormones accumulées".
Et puis l’homme a vieilli, les concerts dans la fosse qui s’apparentaient à une lutte pour la survie ont fait place à une place au fond "là où on peut rester tranquillement assis à picoler, où on voit et on entend tout". Esprit punk, où es-tu ?
D’un regard mi mélancolique, mi amusé sur la fougue anarchiste dont est animée la jeunesse de tout temps, face à l’aspiration à la quiétude dont rêvent la plupart des pères de famille, Tomaz Lavric fait une bande dessinée ironique et implacable sur ce que le temps fait aux cœurs et aux corps.
Rythmé, le récit oscille entre 1980 et 2015, comme un soupir sur une jeunesse achevée, Youri tourne la page en évoquant ses souvenirs. Reste la fureur de vivre d’une bande de jeunes pendant la période post-communiste dans une Europe de l’Est pas tellement optimiste.
Bientôt le temps viendra où les maisons de retraites cracheront du punk dans leurs écouteurs, le fuck à chaque virgule et le majeur en étendard. Oï oï ! Et si jamais un de ces jeunes millénium vous prend à écouter les Sex Pistols, et bien il vous prendra pour un gros ringard. Fuck off bien entendu. |