Passer de Debussy, le précédent et très beau disque d’Elodie Vignon était consacré à ses deux Livres d'Étude, à Dutilleux et Claude Ledoux n’a rien de surprenant. Même si les esthétiques sont différentes, on retrouve de l’ADN de Debussy (avec celle de Ravel et Dukas) chez Dutilleux, ce même sens du mystère, cette même recherche, cette même façon de travailler avec beaucoup de poésie les atmosphères, le son, les harmonies, les mélodies comme une matière. Singulièrement, le nombre de pièces pour piano chez Dutilleux est relativement restreint, même si cet instrument est celui qu’il a toujours pratiqué.
Naturellement, on retrouve ses Trois Préludes pour piano qui sont un hommage évident à Debussy. Ces trois Préludes pour piano sont des pièces autonomes composés en 1973, 1977 et 1988 rassemblées en 1994 et sont dédiés à Arthur Rubinstein, Claude Helffer, William Kapell tué dans un accident d’avion en 1953. Le premier rappel clairement la musique de Debussy.
Dutilleux n’appréciait pas vraiment sa sonate pour piano (1948). Il se cherche encore et cela s’entend dans cette sonate, pas vraiment du côté de Messiaen (Vingt Regards sur l’Enfant-Jésus) ou de Boulez (Notations, Première Sonate, Deuxième Sonate) pas vraiment post-Debussyste non plus. Pourtant cette sonate, quelque part entre tradition et modernité, est plus modale que tonale, est pleine de caractère, séduisante, élégante et dense. Elodie Vignon met bien en lumière la dimension résonante de l’instrument notamment les contrastes de registres et son discours est clair.
Surgir de Claude Ledoux, en deux mouvements avec son impressionnisme moderne et sa poésie, sans atteindre le degré d’écriture de Dutilleux n’est pas inintéressant pour autant. Le compositeur Belge a la volonté de : "traduire le monde dans lequel nous vivons (...) un processus dont nous ne percevons que les évènements surgissant". Traduire pour mieux l’interroger (ces notes staccato sont-elles comme le bruit des bottes ?). C’est donc dans la première partie un tourbillon sonore parfois mue par une frénésie, les notes apparaissant, se révélant jaillissant entre les silences. L’organisation, la segmentation de la pièce semble comme un long en avant... la seconde partie est dans une linéarité comme zébrée de longues lignes mélodiques.
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