"En chacun de nous, il y a comme une ascèse, une partie dirigée contre nous-mêmes. Nous sommes des déserts, mais peuplés de tribus, de faunes et de flores. (...) Et toutes ces peuplades, toutes ces foules, n'empêchent pas le désert, qui est notre ascèse même, au contraire elles l'habitent, elles passent par lui, sur lui. (...) Le désert, l'expérimentation sur soi-même, est notre seule identité, notre chance unique pour l'ensemble des combinaisons qui nous habitent." Gilles Deleuze

Depuis trente ans maintenant, Paolo Alto marque le paysage musicale expérimental français. Il n’est pas question pour Laurent Pernice, Jacques Barbéri et Philippe Perreaudin de se reposer ou de s’assagir, bien au contraire. Le trio rend hommage, sur ce dixième album, album conceptuel, à Soft Machine et à Gilles Deleuze dans un disque forcément surprenant, aventureux, radical et intriguant où collaborent également le trompettiste Rhys Chatham, l’écrivain Alain Damasio (dont Deleuze est la plus grande influence), Richard Pinhas et Thierry Zaboitzeff.

Ce disque se compose de 4 longs morceaux ou "suites" principalement instrumentaux. Il y a quelque chose de troublant, obsédant qui passe par les sons, les atmosphères, les dynamiques, les couleurs et les mots. Comme Gilles Deleuze, cet esprit créatif et engagé et comme dans Third de Soft Machine, la musique semble ne cesser d’évoluer, de se transformer avec une structure comme une nébuleuse dans une sorte de tourbillon sonore dans lequel il est plus intéressant de se plonger que de chercher à totalement analyser.

C’est une nouvelle fois un projet musical ambitieux, hypnotique difficilement classable mais toujours porté par un véritable geste musical.

On trouve donc un travail de précision sur les timbres, les dynamiques, les sons, sur la matière comme en fragmentation, comme en pleine implosion, à l’image de notre société qui ici est remise en cause...

Ce disque est un cri.

Surprenant, aventureux, radical, intriguant et réussi !