Croisée au détour d'une chambre d'hôtel de Pigalle, Laura Veirs confiait récemment qu'être une songwriteuse aux States (qui plus est capable d'enchaîner plus de trois accords en barrés), c'était comment dire, un peu minimal et réducteur.
A cheval entre Joni Mitchell et Sheryl Crow. Un mauvais cheval donc, capable du meilleur comme du pire. On ne sait sur quel pied danser avec Jenny Lewis, on reste debout pour lorgner Rabbit for Coat, et voir ce qui se cache sous le manteau en fourrure.
Vu le physique agréable de Jenny, on serait tenté de rêver, fantasmer un corps mis à nu sous le manteau en lapin, et les débuts semblent le confirmer. Marketing aidant, les meilleurs titres se trouvent au commencement.
"Rise upo with fists" (?!!), très Johnny Cash, laisse entrevoir une rythmique country folk du meilleur effet, une voix agréable quoiqu'un peu neutre, et des mélodies easy listening pour faciliter les frottements de main du producteur. "The big guns", deuxième titre et glissement de terrain vers le syndrome américain, ses chœurs gospel, ses mélopées commerciales et ses slides guitars très –trop- 70' .
Surprise sur le troisième titre, une bonne. Jenny Lewis, sans y penser on s'en doute, évoque l'americana intemporelle sur "Happy", ses intonations et la sensualité qu'on aime tant chez Ambrosia Parsley, chanteuse de Shivaree. L'Amérique des burgers, des stations Texaco et des joueurs de blues en finger picking le long des autoroutes.
Et l'importance d'un producteur, un bon j'entends, prend ici tout son sens. Seule, en acoustique, Jenny Lewis livre de bien belles chansons, comme "Melt your heart". Belles et simples, dénuées de fioritures, mélancoliques comme un américain sans télécommande. Et puis patatras, l'auditeur retombe dans la suavité barbapapa de Jenny et sa chorale sur "Born Secular" ou "Handle with care", ses guitares rappelant REM période "Shiny Happy People"…
Rabbit for coat, un album en dent de scie dur à trancher, tanguant entre Loretta Lynn et la radio FM, le parti pris du non choix ampute ce disque d'une dose d'émotion pourtant palpable. Ne parvenant pas à éviter les glissements de terrain, auxquels Jenny Lewis, californienne, doit forcément être habituée. |