Vous dire que la collection Biographie des éditions Perrin est excellente est un euphémisme. Elle réussit à nous proposer des ouvrages de référence sur des personnages historiques et des périodes variées. Elle a le mérite aussi de s’intéresser à des personnages moins connus du grand public qui ont néanmoins eu ou joué un rôle important dans l’Histoire.
C’est le cas de ce nouvel ouvrage paru il y a quelques semaines, écrit par Max Schiavon, un historien spécialiste de la Seconde Guerre mondiale, qui concerne Maurice Gamelin. Maurice Gamelin est un nom peu présent dans les manuels scolaires qui traitent de la Seconde Guerre mondiale. Son nom est attaché à la défaite de 1940 qui vit la France s’effondrer face à l’invasion allemande sur son territoire, aboutissant rapidement à l’armistice de juin 1940.
Comment Gamelin, cet officier à qui tout réussit depuis sa prime jeunesse, considéré comme l’un des plus brillants de sa génération, ayant la confiance des dirigeants politiques, a-t-il pu conduire les armées alliées au désastre ?
Cette question s’est déjà posée dès septembre 1940 sous la plume de l’écrivain Jules Romains qui publia un article aux USA intitulé "Le mystère Gamelin". Cette question, qui n’a reçu depuis 80 ans que des réponses partielles, mérite encore aujourd’hui d’être posée. Car dans nombre de domaines des interrogations demeurent, interrogations qui sont au cœur de cet ouvrage.
Quels ont été les moteurs de sa vie ? Sa personnalité comportait-elle des failles ? Pourquoi s’est-il vu confier le destin du pays ? Qui sont ceux qui l’ont désigné et avaient-ils conscience de ses faiblesses ? Quels paramètres ont influencé ses propres choix stratégiques et tactiques ?
L’ouvrage est excellent, il nous propose une analyse très poussée sur Gamelin en s’appuyant sur de très nombreuses sources. On voit son ascension, sa période au sommet, son rôle de chef de guerre et ses moments de disgrâce. C’est vraiment pour moi un éclairage important sur ce que March Bloch appela "l’étrange défaite".
Max Schiavon répond donc brillamment à de nombreuses questions que l’on se pose sur Gamelin. Il raconte sa vie publique et sa vie privée, met en lumières ses ressorts intimes, ses expériences, ce qui l’a motivé et poussé à agir. Il démêle les intrigues, les alliances, les ambitions des uns et des autres et apporte bien des précisions sur de nombreux aspects laissés jusque là dans l’ombre. J’ai particulièrement apprécié les nombreuses pages sur le Front Populaire et Gamelin.
L’ouvrage de Max Schiavon a de grande chance de devenir une référence sur le sujet, on saisit bien la complexité de la guerre et des choix militaires qui se font que cela soit pour les opérations comme pour la désignation des chefs. Il permet d’avoir un nouveau regard sur Gamelin, le père du plan Dyle-Breda, si vivement critiqué se demandant s'il est autant responsable de la défaite de 1940 ou s’il ne fut pas là au mauvais moment, au mauvais endroit. |