Ensemble vocal fondé en 2014 par Lila Hajosi, l’Ensemble Irini ("la paix" en grec) "privilégie le travail a capella, s’attache à créer des "liens qui libèrent" entre temps et aires musicales, allant du Moyen-Âge européen à la musique byzantine, à la création contemporaine, et des rives du Croissant Fertile à la cour de Bavière en passant par Constantinople".
Se rencontrent, se mélangent dans ce disque les Prophéties des Sibylles (Prophetiae Sibyllarum) de Roland de Lassus (1532-1594) et des pièces liturgiques de Constantinople composées avant la prise de la ville en 1453 par les Ottomans.
Durant la période du Moyen-Âge, les sibylles, ces femmes qui dans l'Antiquité annonçaient, grâce au don reçu d’Apollon, les prophéties dans l'extase (cette parole qui transcende le temps) et "en qui les Anciens reconnaissaient une inspiration divine et la vertu de rendre des oracles, mais qui, contrairement à la Pythie, qui était attachée au temple de Delphes, étaient indépendantes et vivaient une existence itinérante" furent reprises dans la liturgie.
Le cycle de motets d’un Lassus alors au service de duc de Bavière et indéniable génie de la musique polyphonique comporte une introduction (carmina chromatico), douze parties consacrées chacune à des prophétesses. Une œuvre, révolutionnaire, est célèbre pour son emploi du chromatisme, tout un travail déclamatoire.
L’interprétation y est aussi bien inspirée, mystique, métaphysique presque que mystérieuse (cette fonction du chromatisme a quelque chose de mystérieux). Un disque qui parle aux oreilles comme à l’âme...