Réalisé par Marion Fontaine et Richard Berthollet. France. Documentaire. 52 minutes. (Sortie 2021).
Jeudi 3 février 2022, sur France 3, dans la soirée, on pourra voir "en direct", le documentaire de Marion Fontaine et Richard Berthollet sur "La Grande Tueuse", c'est-à-dire la mine et ses accidents, ses maladies (silicose, bronchite chronique) et ce que les médecins appellent le "préjudice d'anxiété". On pourra aussi le revoir en ligne selon les modalités propres aux programmes du service public.
Les deux auteurs s'intéressent à la mine après 1945 quand le gouvernement provisoire animé par le général de Gaulle nationalise tout le secteur minier et fait des "Charbonnages de France", un élément stratégique majeur pour la reconstruction d'un pays meurtri par la guerre. Ce sera la période de la "bataille du charbon".
De 1944 à 1958, la production française va passer de 20 à 60 millions de tonnes. Ce triplement va s'effectuer à marches forcées et sans tenir compte des conditions de travail des mineurs.
Comme le travail au fond s'est mécanisé avec la généralisation des marteaux-piqueurs, la silicose devient un fléau chez les mineurs qui vivent dans la poussière dégagée par l'extraction.
Mal protégés par des masques vite inutiles, poussés à hausser leur productivité par des cadences toujours plus soutenues, ils sont atteints en masse par la silicose qui est désormais détectée par l’introduction d'une médecine du travail qui pratique le suivi radiologique des poumons des mineurs. Fini le temps où l'on expliquait que la mortalité prématurée des mineurs provenait de leurs "vices", tabac et alcool...
"La Grande tueuse" suit en priorité le bassin minier lorrain qui est mis en avant en 1945 et sera dans les années 1990 le dernier a cessé toute activité. A travers des décennies de luttes agrémentées de tragédies humaines avec des coups de grisou spectaculaires et des accidents quasi journaliers, Marion Fontaine et Richard Berthollet racontent la condition terrible des mineurs.
Se battre, comme ils l'ont fait courageusement, pour obtenir des avancées sociales, conduit l'Etat à réduire son recours au charbon devenu dès lors moins bon marché que le pétrole.
Aujourd'hui, il n'y a don plus de mineurs en France, mais restent des survivants, qui ont eu la chance de ne pas mourir de silicose comme leurs camarades mais qui ont tous eu des séquelles.
Laissant largement la parole aux syndicalistes CFTC et CFDT qui ont joué un rôle majeur dans la défense des mineurs lorrains, ainsi qu'aux médecins qui ont soigné les mineurs dans la même période, les auteurs de "La Grande Tueuse" ont traité clairement leur sujet.
Sans esprit polémique, mais sans épargner le patronat des houillères ni oublier les ambiguïtés des gouvernements successifs qui ont navigué à vue entre relance et abandon de la filière charbon, ils expliquent comment la santé des mineurs a peu compté dans les politiques menées et les décisions prises.
Désormais les mineurs sont entrés dans l'histoire. Reste pour eux à attendre la reconnaissance pleine et entière de leurs souffrances. Cela passe peut-être par un hommage national et l'entrée de l'un des leurs au Panthéon... |