Réalisé par Chema García Ibarra. Espagne/France/Turquie. Tragi-comédie. 1h37 (Sortie 6 juillet 2022). Avec Llum Arques, Nacho Fernandez, Rocío Ibanez, Joanna Valverde et José Angel Asensio.

Généralement, les jeunes réalisateurs espagnols lorgnent quelquefois du côté de Luis Buñuel, et trop souvent du côté de Pedro Almodovar. Ce n'est pas le cas de Chema Garcia Ibarra qui propose un cinéma loin du surréalisme de l'un et de l'exubérance de l'autre.

Si le sujet a à voir avec l'Egypte pharaonique et les extraterrestres, il ne sera jamais question d'abuser d'effets spéciaux ni de développer des théories fumeuses.

On est ici dans de l'étrange banal avec un groupe d'"ufologues" qu'on pourrait tous croiser dans la rue. Menés à la mort de leur "gourou" par un petit personnage à la triste figure (Nacho Fernandez), qui s'avère un acteur non-professionnel comme la plupart de ceux qui jouent dans cette fiction, ils participent malgré eux à l'horreur moderne.

On n'en expliquera pas davantage sinon que le fondateur de cette secte apparemment anodine n'était pas à proprement parler recommandable.

"L'Esprit sacré" de Chema Garcia Ibarra montre avec beaucoup de subtilité comme des esprits simples et un peu perdus deviennent sans le vouloir des complotistes au petit pied et comment des choses aussi désagréables que la pédophilie se camouflent derrière cette niaiserie médiocre.

Au fond, si l'on osait, on dirait que "L'Esprit sacré" est un film qui réussit là où Houellebecq échouait dans l'adaptation cinématographique de son roman "La Possibilité d'une île".

On affirmait tout à l'heure que le cinéaste n'était pas inspiré par Luis Buñuel, on mettra maintenant un léger bémol : comme l'auteur de "Viridiana", il distille dans ce film triste et tragique comme une comédie finlandaise d'Aki Kaurismaki une cruauté douce qui n'aurait pas déplu à Don Luis.

"L'Esprit sacré" de Chema Garcia Ibarra déstabilisera nombre de spectateurs qui ont l'habitude d'un cinéma qui leur mâche le travail. Déjanté, décalé, souvent plus allusif qu'affirmatif, il est porté par le visage silencieux de Nacho Fernandez, disciple sans le savoir de Buster Keaton.

Ceux qui prendront le film par le bon bout apprécieront son humour glacial et son désespoir poli.