Comédie dramatique d'après le roman éponyme de Karine Tuil, mise en scène de Johanna Boyé, avec Valentin de Carbonnières, Nassima Benchichou, Brigitte Guedj, Elisabeth Ventura, Mathieu Alexandre, Yannis Baraban et Kevin Rouxel.
Arrivé de France, Samuel est devenu en moins de quinze ans un des avocats les plus en vue de la Côte Est des Etats-Unis. Il s'est marié à la fille du principal associé du célèbre cabinet où il officie, rejoignant ainsi une des familles juives les plus puissantes du pays.
A la suite d'une affaire très médiatisée, son image est montrée dans les journaux télévisés du monde entier, d'anciens amis reconnaissent en lui Samir Tahar qui vivait dans une cité de banlieue. Lorsque la vérité éclatera, cela provoquera une réaction en chaîne.
En adaptant "L'invention de nos vies", le best-seller de Karine Tuil, Johanna Boyé et Leslie Menahem se sont servies du rythme soutenu du roman pour produire une transposition théâtrale toute aussi enlevée et passionnante. La mise en scène de Johanna Boyé file à grande vitesse.
Eclairé magnifiquement par Cyril Manetta, l'espace de jeu (une scénographie sobre et évocatrice de Caroline Mexme composée d'un rideau de fils gris et d'une arche imposante) se transforme à vue avec une fluidité exemplaire et l'ensemble donne à cette brillante adaptation une densité rare.
Le public est littéralement happé par ce spectacle au suspense permanent d'où ressurgissent secrets et mensonges du passé. "L'invention de nos vies" est un spectacle puissant et haletant qui parle à la fois de l'identité, de l'intégration, de l'ambition et de la construction de son personnage social.
Nonobstant quelques clichés dispensables, l'histoire de Karine Tuil est bien ficelée et rend compte de l'état du monde actuel, fustigeant au passage son cynisme et le règne de l'apparence.
Johanna Boyé dirige avec brio une distribution de qualité au collectif bien huilé qui sert avec énergie l'histoire. Elisabeth Ventura est une épouse digne et combative très émouvante. Yannis Baraban compose à la fois le père aux accents tyranniques ainsi que Pierre, l'ami et mentor plein d'humanité. Il est grandiose.
Dans le rôle de l'autre Samuel, écrivain contrarié et dépressif, Mathieu Alexandre est exceptionnel. Il forme avec Nassima Benchicou, impeccable, un duo intéressant. Pour incarner la mère et le frère de Samir ainsi que d'autres personnages où ils sont également crédibles, Brigitte Guedj et Kevin Rouxel complètent efficacement la distribution.
Quant à Valentin de Carbonnières, en Samuel -Samir, il est une nouvelle fois, après "7 Morts sur Ordonnance" et "Transmission", éblouissant de talent et montre entre charme et rage toutes les nuances possibles dans la descente aux enfers de son personnage et sa métamorphose. Le comédien s'impose, rôle après rôle, comme un des plus doués de sa génération.
Un palpitant et dynamique thriller choral à ne pas rater. |