Comédie écrite et mise en scène par Alessandro Baricco, avec Christophe Lambert, Laurent Caron, Lolita Chammah, Lou Chauvain, Andréa Tshibuabua et Géraldine Tshibuabua.
1902. Un hôtel aux pieds des chutes du Niagara. Alors qu'il est alité pour sa cure annuelle de "rééquilibrage" dans l'établissement tenu par la prostituée locale, Madame Higgins, et se nourrit exclusivement de purée de fèves, le taciturne Tom Smith (Christophe Lambert) reçoit une visite.
Il s'agit de Jerry Wesson (Laurent Caron) qui, en tant que météorologue, récolte toutes les données sur le temps qu'il a pu faire les décennies précédentes pour des statistiques. Or, Smith est pêcheur. Un pêcheur un peu particulier dont la spécialité est de récupérer les corps des gens tombés dans les chutes par romantisme ou imprudence et peut le renseigner sur le temps du jour.
Un troisième personnage finira par arriver dans l'hôtel de Madame Higgins : Rachel Green (Lou Chauvain), jeune journaliste qui doit absolument trouver un scoop pour le journal dans lequel elle écrit. Elle leur propose alors de l'aider à se jeter dans les chutes enfermée dans un tonneau...
Après des textes aussi profonds et forts que "Novecento pianiste" ou "Soie", Alessandro Baricco a écrit en 2018 "Smith & Wesson", pièce singulère et déconcertante.Il la met en scène lui-même dans l'adaptation et la traduction de Lise Caillat.
Avec une scénographie minimaliste magnifique de Maggy Jacot, hommage au Far West, les comédiens se régalent de cette fantaisie tragi-comique aussi absurde que délirante qui parle de la place des femmes dans la société, du goût de la célébrité et de la société du spectacle.
C'est burlesque et plein d'inventivité. Deux elfes (Andréa et Géraldine Tshibuabua) apparaissent et disparaissent à la vitesse de l'éclair. Les scènes courtes s'enchaînent. Pour l'exploit de Rachel, Alessandro Baricco place le public dans le noir complet avec uniquement le son des cascades, de l'impact et des halètements de Rachel.
Christophe Lambert et Laurent Caron forment un duo efficace. Quant à Lou Chauvain, pétillante, elle éblouit de sa présence et de son naturel.
Avec en sus le monologue final sublime de Madame Higgins (Lolita Chammah, étherée) habillée telle la reine d'Alice aux pays des merveilles (costume incroyable de Giovanna Buzzi), "Smith & Wesson" n'en finit pas de surprendre et distille au final un indicible charme nostalgique. |