Monologue écrit et mise en scène par Pascal Rambert interprété par Jacques Weber.
A l'intérieur d'un cadre métallisé, le décor blanc ultramoderne aseptisé d'une chambre hôtel, semblable à celle d'un hôpital. La scène se passe à Hong-Kong.
Revenant d'une cérémonie en son honneur, l'écrivain en costume trois pièces allume les aveuglants néons, pose les présents reçus et parle face au cadre posé sur la table, à sa femme disparue.
Pascal Rambert a écrit "Ranger", la dernière nuit d'un homme qui tente de mettre sa vie en ordre avant de disparaître, .pour son ami Jacques Weber qu'il a dirigé dans "Architecture" en 2019.
S'adressant à celle dont il vit encore dans ses phrases à elle (qui était également dans l'écriture), il raconte avec humour sa soirée, le passage manifeste dans le grand âge, avant de lui avouer l'incommensurable absence qu'il n'arrive plus à combattre. Et c'est avec quelques aides chimiques et spiritueuses, qu'il dévide la bobine du film de leur vie.
Magistral, avec un lâcher-prise qu'on ne lui a pas souvent vu au théâtre, Jacques Weber incarne ce flegmatique et mélancolique veuf qui ne goûte plus à la vie depuis qu'il a été séparé de celle avec qui il en a partagé cinquante-cinq années.
Faisant le compte avec nostalgie des périodes passées à s'aimer et des pays traversés, il se remémorera quelques souvenirs forcément heureux car avec elle. Dans un ultime baroud d'honneur, il esquissera avec élégance quelques pas de danse sur une chanson des Stranglers puis contemplera la vue par la baie vitrée, son ours en peluche d'enfance à elle sur les genoux.
Tout au long de ce poême d'amour de Pascal Rambert où l'on retrouve les thèmes chers à l'auteur (l'amour, la mort, la solitude...) et qui aborde également le contexte chinois, le comédien dans un diction de plus en plus pâteuse à mesure que se vident les bouteilles d'alcool crée un moment rare et éminemment captivant d'où flamboient quelques brèves fulgurances d'humanité, qui envisage la fin de l'histoire avec lucidité.
Sombre et poignant. |