On a très longtemps critiqué les quatre derniers quatuors (les trois quatuors prussiens et le quatuor n°20 "Hoffmeister") pour une certaine distanciation que l’on a assimilé à un manque d’inspiration. Cela semble assez surréaliste. Alors que Mozart est en proie à de nombreuses déconvenues et à une pauvreté grandissante, il compose ces superbes pages aussi belles que sereines en presque totale opposition avec sa vie au même moment.

Depuis ses débuts : le quatuor n°19 de Mozart, le n°13 de Schubert en 2011 puis le n°11 de Beethoven et le n°15 encore chez Mozart en 2011 et 2013, le quatuor Chiaroscuro (Alina Ibragimova et Pablo Hermán Benedí aux violons I et II, Emilie Hörnlund à l’alto et Claire Thirion au violoncelle) a évolué, ajoutant à son répertoire Haydn, vers l’excellence. Il y a quelque chose de lumineux, de chantant dans cette interprétation de ces quatuors qui demandent une certaine délicatesse, de la dextérité mais également de la légèreté. Il n’est pas question ici de virtuosité mais de compréhension du texte, des lignes mélodiques.

Le quatuor ne surjoue jamais, préférant l’épure, la vérité des phrasés, des nuances, des dynamiques, une recherche de timbres (cordes en boyau, absence de vibrato, une pratique historiquement informée, l’accord en la 432...) de caractères, de contrastes et de couleurs. On sent comme une relation fusionnelle entre les quatre musiciens, capables de marier une sonorité d'ensemble à la fois très homogène et pour autant individualisée.

Une interprétation qui fera date.