Réalisé par Vasilis Katsoupis. Etats Unis. Thriller. 1h46 (Sortie 1er novembre 2023). Avec Willem Dafoe, Eliza Stuyck, Gene Bervoets, Josia Krug.

Voilà un film limite "expérimental", signé d'un nouveau réalisateur, grec certainement influencé par Yorgos Lanthimos le plus célèbre metteur en scène hellène et le plus sophistiqué.

On pouvait déjà s'en douter grâce à la présence de Willem Dafoe, et ses traits taillés à la serpe, son visage ridé, ses yeux presque pochés... Présence quasi unique, si l'on excepte la petite femme de ménage qu'il aperçoit sans qu'elle le voit, hélas, hors de l'immense appartement où il est reclus.

Tout commence comme dans un film genre "L'Affaire Thomas Crown". Dafoe, tout en noir, équipé d'une oreillette se dirige un peu téléguidé par la voix de son oreillette dans un dédale de pièce, à la recherche de ce qu'il veut voler : deux tableaux d'Egon Schiele. Objectif atteint, il n'a que quelques secondes pour sortir de cet endroit gigantesque où est entassé des kilomètres d'art contemporain... Hélas pour lui, à deux ou trois secondes près, la voie ouverte se referme et le voilà piégé, comme la méchante pharaonne dans la Grande Pyramide de "La Terre des Pharaons" de Howard Hawks).

Dès lors le film est d'une simplicité enfantine, tout comme son message. Tel Robinson Crusoé, Nemo, c'est évidemment le nom donné à Dafoe et qui fait référence à Ulysse se présentant ainsi au Cyclope, va devoir survivre sur une "ile déserte" en plein New York. Et sans trahir le suspense, on peut dire qu'il va y rester des mois sans qu'aucune personne ne pénètre dans ce lieu à l'abri du temps court, puisque toutes ses "richesses" artistiques suivent la loi d'un marché de l'art qui ne suit pas le même cours au jour le jour que les bourses monétaires...

A l'inverse de Robinson, Nemo part avec quelques victuailles haut de gamme, mais le belouga ça se mange très vite et on ne peut pas le faire pousser. Alors que Robinson se constituait peu à peu un beau garde-manger, récupérait de l'eau potable et des chèvres à traire, lui doit user d'une imagination débordante pour se procurer quelque chose à manger dans ce lieu débordant de pseudo-richesses quasi immatérielles. Nemo dézingue un endroit où tout n'était que "luxe, calme et beauté".

S'en sortira-t-il ? On ne répondra pas et on laissera à chacun le soin de dire si la résolution du film est juste ou crédible.

"A l'intérieur" de Vasilis Kazoutpis semble se moquer de l'art moderne. A titre documentaire, il pose la question de sa valeur spéculative qui en fait quelque chose hors sol maintenue loin de tout regard et ainsi condamnée à disparaître. Duchamp disait que c'est le regardeur qui fait oeuvre. "A l'intérieur" le démontre amplement.

La question ultime sera de savoir si un tel sujet mérite qu'on réalise un film et, a fortiori, qu'on ait envie de le voir.