Rooting For Love
(Duphonic Super 45s / Drag City) février 2024
Je ne vais pas vous répéter pour la énième fois combien Stereolab et Laetitia Sadier comptent pour moi (lisez mes précédentes chroniques pour ça).
Je ne vais pas davantage vous vanter encore une fois les mérites et les talents de la plus Anglaise des Françaises qui sort là son cinquième album solo, c'est-à-dire sous son nom. On peut y ajouter évidemment tous les disques de Stereolab et ceux de Monade, ce qui commence à faire une belle carrière.
Bref, je vous épargne au moins 3 paragraphes mais je ne peux pas décemment vous laisser passer à côté de ce nouvel album de Laetitia Sadier, que l’on attend mine de rien depuis 7 bonnes années et la sortie de Find me finding you sous le nom de Laetitia Sadier Source Ensemble.
Rooting for love s'inscrit dans la continuité de Silencio ou Something shines, un disque que l’on pourrait qualifier de militant, ou plutôt comme un témoignage critique de notre société et ses facettes parfois peu reluisantes. Messages politiques, féministes sont passés dans la plus grande des douceurs. Et c’est bien ce qui fait la particularité de Laetitia Sadier. Nul besoin d’élever la voix quand la sienne, de voix, est si reconnaissable (on aime ou pas, mais ça mérite de se pencher sur la question) et sait poser sans l’ombre d’une hésitation des mots forts et percutants dans la plus grande placidité apparente, accompagnés par des arrangements au cordeau qui font encore des miracles. On retrouve d’ailleurs sur l’album Emmanuel Mario qui l’accompagne depuis longtemps et Nina Savary (tout deux membres de Institut ou encore Astrobal, deux groupes qui eux aussi aiment jouer et expérimenter avec la pop).
Des titres superbes, avec ce je ne sais quoi d’imprévisible qui les empêche d’être des tubes au sens pop du terme, tout en restant dans la tête avec cette envie d’y revenir en permanence.
La recette ne varie pas beaucoup au fil des disques mais les saveurs sont toujours surprenantes et les ingrédients toujours inattendus. On retrouve bien entendu cette patte très cinématographique et légèrement vintage de Stereolab, ce sentiment de voyager dans le temps, complétée par des textes tantôt en français, tantôt en anglais mi-chanté, mi-parlé mais qui se pose toujours avec délicatesse sur la musique, dans une légèreté qui confine au détachement si unique et qui est la signature incontestée de Sadier.
Comme si chanter était une sorte de mécanisme au service de la mélodie, comme de jouer de la guitare, de la trompette ou du clavier. Cette voix si sensuelle et délicate permet de passer des messages forts avec une certaine grâce et une douce mélancolie.
Pour résumer, on se sent bien dans un album de Laetitia Sadier une fois qu’on en a compris les contours et la règle du jeu, comme enroulé dans une couette ultra confortable mais avec quand même la conscience qu’en dehors de cet écrin de douceur, c’est le chaos de partout et c’est ça qui est beau.
Alors foncez sur ce disque qui encore une fois est une réussite d’une artiste à la fois culte et sous-estimée (ça va malheureusement souvent ensemble).
# 21 avril 2024 : Des beaux disques, des beaux spectacles, une belle semaine
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