Qu’y a-t-il de commun entre un poète qui veut absolument se débarrasser d’un héritage pour demeurer dans la pauvreté élément indispensable de sa crédibilité artistique ("L’argent"), une ville dans laquelle tout mensonge est banni ("La ville franche") et l’éloge funèbre d’un chapeau écrasé ("Le chapeau") ?
Kornél Esti, le double de l’écrivain hongrois Dezso Kostolanyi qui, comme ce fût la mode dans les petits cercles littéraires, est un conteur d’histoires. Témoin impassible, observateur amusé ou sujet d’aventures quasi humanistes, il distille des contes merveilleux, horribles ou fantasques.
Mais ces nouvelles brillantes, absurdes, drolatiques ou burlesques recèlent des peintures sociales pertinentes et impertinentes, de réflexions politiques caustiques et de points de vue sur l’existence.
Par le biais fictionnel de la description d’un monde symétrique, Dezsö Kosztolànyi tend un miroir dans lequel le tragi-comique de ses contemporains se mire avec une béatitude interloquée.
Premier président du Pen Club hongrois, journaliste, poète, traducteur, polyglotte, Dezsö Kosztolànyi est doté d’une plume ironique, de cet humour ambivalent né de l’union de l’intelligence du concret et de l'ironie désespérée, caractéristique de la Mitteleuropa.
Et derrière ces contes on trouve toujours un deuxième niveau de lecture. Dezsö Kosztolànyi traducteur livre ses réflexions sur le travail et les difficultés de la traduction ("Le traducteur cleptomane") polyglotte devise sur le langage comme moyen de communication ("Le contrôleur bulgare") et conférencier que le bienfait vital des conférences insipides ("Le président").
Les contes comme les fable contiennent une morale ou un enseignement et Dezsö Kosztolànyi ne faillit pas à la règle. A chaque lecteur le soin de les déceler au fil d’une lecture qu’on lui souhaite, sans guère de crainte, jubilatoire et roborative.
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