Du blues, du pur, du bon vieux blues. Rien de plus, mais c'est déjà énorme. A l'écoute de l'album, on est dans le Delta - notez le D majuscule - car avec Don Cavalli tout est majuscule.
Mais pas du tout le Delta qu'on imagine. Don Cavalli est un bluesman français, Môssieur. Sauf qu'à l'entendre, on se croirait aux States (comme dirait l'autre). Ca sent la Nouvelle Orléans, les marais du bayou, le delta du Tennessee et les rues de Memphis (oui tout ça à la fois !).
La production est excellente, les guitares sonnent et claquent, l'harmonica transporte l'auditeur de l'autre coté de l'Atlantique ("Gloom Uprising"). La voix semble forgée au Jack Daniels. Les compositions sont classiques (les schémas y sont plus que respectés) et innovantes, les mélodies sont complètes, il n'y manque pas une note d'originalité pour étoffer le genre.
"I'm Going to a River" est comme le fleuve, ondulant tel un serpent, entre nos oreilles, pour mieux pénétrer le corps et l'âme. "Agression" sort les tripes vocales du chanteur, par un hara-kiri à la gorge effectué au micro. Pédale Wah Wah et voix se mélangent pour nous sur "Vengeance", contraste entre la simplicité efficace de la musique et le chant posé.
Don Cavalli va lorgner plus loin que les terres du sud américain, en réalisant un pont vers des sonorités reggae sur "Wandering Wanderer", ballade tranquille. Chez le Don, la simplicité mélodique ne rime jamais avec facilité, la toute relative avarice de notes de "Hollywood Babylon" cache un talent de compositeur plus qu’efficace.
Il est difficile de récupérer son amour, "Chérie de Mon Coeur" s'essaye à faire revenir cette femme ingrate partie on ne sait ou, dans un mélange de langues de Babel. Franchement si elle ne revient pas, c'est qu'elle ne mérite pas les honneurs du Don.
Enfin, peut être lui faudra-t-il retourner travailler et être un "Casual Worker" pour la garder. Ce titre est une explosion de guitares qui se tournent autour, sûr qu'on n’a pas envie de faire ces petits boulots qui l'ont mis dans cet état. Enfin, une reprise, plus que personnelle, de "Summertime" vient clôturer les 13 morceaux de ce disque, espérons que le chiffre lui portera bonheur.
Il ne sert à rien de faire du name dropping (en français le tombé de nom) pour cerner la musique de Don Cavalli, ce ne serait pas rendre justice au travail réalisé ici. L’exécution et la composition de ce disque sont tellement personnelles et originales qu'il n'est nul besoin de rapprocher sa musique d'une quelconque brochette d’artistes du genre, de toute façon, tout le blues est là entre nos oreilles.
Belle réalisation que ce premier disque, à écouter d'urgence. Nul doute que Don Cavalli est allé, à la croisée des chemins, passer un pacte avec le diable : son âme contre cette rafraîchissante virtuosité et qualité musicale. |