Vendredi, 18 h 30, au Théatre de Ménilmontant, les 3 Jeanne
arrivent en ordre dispersé. Marthe Hélène Raulin,
la blonde frisée, est déjà là quand j’arrive.
Vient ensuite Bénédicte Capiat, la brune. Eliane
Boeri, une de co-fondatrices des Jeanne, clôt la marche et
apporte un cadeau pour Marthe Hélène à faire pâlir
Bénédicte : un nouveau diadème en strass brillant de
ses mille feux pour remplacer sa couronne de scène bien ternie déjà
par les multiples représentations !
Toutes les trois, fines, menues et débordantes d’énergie
m’accueillent avec gentillesse et simplicité. Elles me font traverser
la scène pour gagner les loges et à peine le micro branché,
nous repartons sur scène. En effet, Mario Dalba vient les faire répéter
la chanson du spectacle pour laquelle les comédiennes souhaitent se
rafraîchir de temps en temps le tempo.
De retour dans les loges, pendant que Patinette, l'habilleuse, prépare
les costumes ...:
Racontez nous le tout début des Jeanne
Eliane Boeri : Le tout début, c’est des frangines, des
copines, qui divorcent dans les années 70, pendant les mouvements féminismes,
il y en a qui sont comédiennes elles sortent d’une troupe et
elles se disent tiens on va essayer de raconter leurs malheurs.
Le pia-pia des copines ?
Eliane Boeri : Oui, mais surtout le râlage des copines. Ce
sont des râleuses. Elles commencent à se faire rire les unes
les autres de leurs malheurs et s’aperçoivent que tout le monde
a les mêmes. Se dégage une espèce de fraternité,
on rit beaucoup. On met cela en scène dans un café théatre
et ça devient un succès immédiat. Nous allons jouer pendant
7 ans le premier spectacle "J’te le dis Jeanne c’est
pas une vie la vie qu’on vit" qui était le constat
de nos vies.
Quand on en marre, on en peut plus, on en fait un deuxième en se disant
qu’à force de gueuler il y a peut être des choses qui vont
changer . Ce sera "Jeanne ma sœur Jeanne ne vois tu rien venir
? Je ne vois que l’herbe qui poudroit" et en fait, 20 ans
après c’est toujours pareil.
Alors 20 ans après ?
Eliane Boeri : Avant de remonter les Jeanne pour des raisons X ou
Y, nous avons relus les textes pour voir si les choses ont évolué.
Nous sommes allées voir des copines qui travaillent au CNRS pour étudier
les moeurs sociologiques de l’Europe et des français qui sont
la lanterne rouge de l’Europe en ce qui concerne le paritarisme homme/femme.
Et on s’aperçoit que rien n’a changé en matières
d’égalité des salaires, que les femmes qui sortent des
grandes écoles n’ont toujours pas obtenu plus de postes de haut
niveau dans les grandes entreprises, de même en politique.
Donc on s’aperçoit que les textes sont toujours aussi drôles
et qu’on pourrait peut être les remettre sur scène en mélangeant
les deux spectacles et en prenant des morceaux choisis. Et donc, on les a
remis sur scène avec une nouvelle équipe de nouvelles fraîcheurs
que je vous présente : Bénédicte Capiat et Marthe Hélène
Raulin qui sont mes amies.
Comment et avec qui avez-vous fait cette sélection de textes ?
Eliane Boeri : J’ai travaillé avec une des anciennes
Jeanne Chantal Pelletier qui se consacre maintenant à l’écriture
(NDLR : voir la chronique sur
More is less). Nous avons choisi les textes également avec
Jean Marc Mondier notre producteur qui est à l’initiative de
l’aventure, qui nous a beaucoup aidé, propulsé, soutenu
et porté. Nous formons un petit groupe d’amis. Une amie de ma
famille s’occupe des tournées, elle vend même le spectacle
avant qu’il n’existe. Et c’est extraordinaire, on retrouve
un public fidèle aimant. Je suis partie à la recherche de ces
hypothétiques Jeanne que je ne pouvais pas remplacer car l’une
était ma sœur, Martine Boeri, qui a disparu, donc irremplaçable
par définition et dont l’autre Chantal ne souhaitait pas remonter
sur scène. Donc j’ai cherché les copines avec qui faire
ça. Et je trouve mes perles à qui je vais passer la parole.
Vous n’avez pas vu le spectacle à l’origine ?
Marthe Hélène Raulin : Si moi je les ai vus. Pas le
premier spectacle. J'ai vu le second spectacle et puis celui à la maison
des jeunes et de la culture à Tilly. J'adorais leur travail . Je connaissais
Eliane depuis 20 ans.
Bénédicte Capiat : Et moi je connais Eliane depuis
12 ans.
Ça reste donc une histoire de copines ?
Eliane Boeri : Oui, c’est une histoire de copines. C’est
d’ailleurs plus facile, plus chaleureux, il y a de la confiance, de
l’estime qui existent et que l’on n’a pas besoin de construire
et d’installer. Les nouvelles Jeanne ce sont deux filles qui ont joué
chez Savary mais sans aborder le comique. C’était donc tout une
aventure de jouer une pièce comique, c’est tellement particulier,
merveilleux et satisfaisant à partager avec le public. J’ai eu
le privilège de les choisir et elles font ça mieux que personne.
Et pourquoi avez-vous choisi de jouer dans cette nouvelle mouture des
Jeanne ?
Eliane Boeri : Parce que je suis comédienne, que mon métier
est de jouer, parce que je pense être d’essence comique et que
l’idée de reprendre ce rôle m’a plu et que je ne
vois pas pourquoi je me serais privée de ce plaisir.
Mais quand vous jouez aujourd’hui, n’y a-t-il pas des réminiscences
des spectacles passés ?
Eliane Boeri : Non, cela fait partie du passé. Et puis tout
est transcendé. On a aussi beaucoup mélangé les cartes
et donc les textes ont été modifiés par rapport à
ceux que j’ai joués.
Y a-t-il des textes réécrits ?
Eliane Boeri : Non, il n’y a pas de textes réécrits
mais il y a un tel mic-mac des textes qui sont ceux de l’époque
mais que l’on a mélangés pour reconstruire un nouveau
spectacle.
N’avez-vous pas été tentées d’insérer
des textes nouveaux ?
Eliane Boeri : On l’a fait avec Chantal. On a essayé
d’écrire de nouveaux textes mais tout ce qu’on écrivait
nous semblait moins bon que l’existant par rapport au propos que nous
voulions servir. Sur ce thème là, nous avions tellement mené
à la perfection les choses du fait que nous l’avons joué
aussi longtemps et que cela se construit sur le public. Et comme nous étions
auteurs, nous pouvions peaufiner ce qui n’allait pas. Nous l’avons
amené, il faut le dire, à une telle justesse de ton qu’il
était difficile de le reconstruire.
Pour les petites nouvelles, comment avez-vous abordé le rôle
pour l’une et pour l’autre, comment vous êtes-vous dégagée
du spectacle que vous connaissiez ?
Marthe Hélène Raulin : Pour moi, le spectacle était
quand même lointain déjà. Nous n’avons pas regardé
les cassettes des spectacles précédents. Eliane nous a fait
répéter très mécaniquement, avec au début
un travail très rigoureux. J’ai découvert que le travail
du comique était très rigoureux et nous nous sommes laissées
porter par Eliane.
Bénédicte Capiat : Moi, je n’avais aucune image.
Donc j’ai découvert le spectacle avec un œil complètement
neuf et surtout une nouvelle manière de travailler. L’abord du
comique est un autre aspect du théatre avec une mécanique différente.
Eliane me disait tout le temps : "Arrête de jouer !" Il n’y
a pas de psychologie alors que j’ai toujours joué des rôles
dramatiques où on savait le pourquoi des choses. Alors que là
quand je fais le chauffeur de bus, je mets ma casquette je me disais pourquoi
? Et Eliane me disait "Non ! "
Eliane Boeri : C’est factuel , c’est pour faire rire
les copines.
Bénédicte Capiat : Nous avons répété
six mois. Et on continue en tournée, et même maintenant, vous
voyez (NDLR : la répétition de la chanson).
Marthe Hélène Raulin : Nous nous sommes appropriées
le rôle en jouant.
Bénédicte Capiat : Nous nous sommes appropriés
le rôle avec nos voix, nos physiques, nos caractères.
Marthe Hélène Raulin : Tous ces personnages en un soir,
pour une comédienne, c'est un cadeau.
Le spectacle a un rythme très soutenu qui est quasiment
"épuisant" pour le spectateur
Eliane Boeri : Je en sais pas comment je dois leprendre mais c'est
drôle en tout cas (rires).
Epuisant au bon sens du terme. Je veux dire que le spectateur n'a pas
le temps de s'ennuyer tellment il est scotché sur son fauteuil. Les
scènes s'enchainent à un rythme très rapide. Parfois,
on rit encore alors que la scène suivante est déjà commencée
au point où on peut en rater un petit bout.
Eliane Boeri : Ce n'est pas très grave. Quand les gens rient,
on a deux solutions : soit on arrête et on attend qu’ils aient
fini, et ça fait un peu Jean Lefèvre..
Bénédicte Capiat : Ça sera noté ! (rires)
Eliane Boeri : C’est pas méchant, c’est du théatre
de boulevard qui fonctionne sur ce schéma. Ou alors on fait une accumulation
de choses qui disent toujours la même chose mais sous des formes un
peu différente donc si on en loupe un peu ce n’est pas grave
car ce n’est pas dommageable à la compréhension du spectacle.
Ce qui est essentiel c’est le rythme.
Effectivement ce n’est pas comme un vers de Shakespeare…
Bénédicte Capiat : Oui c’est la forme de ce spectacle,
le parti pris de la mise en scène, que l’on fasse tous les changements
à vue.
Marthe Hélène Capiat : Le spectacle a un côté
chorégraphique.
Eliane Boeri : Ça a un côté réjouissant.
Comme des petites filles qui jouent : on dirait que on jouerait que
on serait. C’est exactement ça. Des petites filles dans une cour
d’école : Et je serais la maman et tu seras le médecin…et
paf paf on est la maman. Après il y a des chutes et on rebondit sur
autre chose. La mécanique est plaisante, il y a un côté
enfantin et les gens ressortent enchantés du spectacle et j’en
suis la première étonnée et ravie. La mécanique
qui marchait il y 20 ans marche toujours aujourd’hui parce qu’elle
fait appel à notre âme d’enfant.
Quel est aujourd’hui votre public ?
Eliane Boeri : Nous avons une chance folle. Nous sommes comme Tintin
on a de 7 à 77 ans. J’ai deux petites filles de 7 ans qui sont
folles du spectacle et de voir leur grand mère faire la couillonne
sur scène. Ainsi hier soir, nous avions au premier rang un couple qui
devait avoir 70 ans, qui se tenait la main et qui a ri tout le long du spectacle.
Ils nous ont fait une standing ovation à la fin du spectacle. C’était
trop joli. Il y a des bandes de jeunes qui viennent car nous faisons des places
à 10 euro. Ils viennent à 10-12 comme ils iraient au cinéma.
Vous reprenez la formule du café théatre ?
Eliane Boeri : Plus exactement du théatre populaire. Le café
théatre c’est plus un lieu qu’un style de théatre.
Oui, le théatre populaire où tout le monde a accès parce
que le théatre est cher et que tout le monde ne peut pas y aller. Ce
qui est dommage. Nous avons des collectifs de femmes turques qui viennent.
Le public est très mélangé. Et surtout des jeunes. Ils
adorent le spectacle. Ils ne voient pas le côté sociologique,
ils s’en tapent un peu, mais ils aiment la verdeur du spectacle, le
côté clown, lumière, chanson, costume. Ils adorent sans
savoir si c’est le mec ou la nana qui a morflé. Ça c’est
un peu dépassé je crois.
Moi j’ai été gênée par le volume de la
salle qui est grand. Je voyais mieux le spectacle dans un lieu plus intimiste.
Cela ne vous gêne pas ?
Eliane Boeri : Non, nous avons l’habitude de jouer dans les
grandes salles. Nous avons joué au café théatre que 3
mois mais cela nous a collé une étiquette. En fait, après
nous sommes allées au Palais des Arts de 900 places, puis au Théatre
Fontaine de 600 places, à l’Atelier. Nous ne sommes jamais retournées
dans des petites salles. Quand nous sommes en tournée, nous jouons
dans des salles de 800-900 places. Donc cette salle nous convient très
bien. C’est une belle salle de 350 places tout à fait appropriée
pour un spectacle quotidien. Sans compter que, il faut le dire, nous sommes
dans le meilleur théatre de Paris, pour l’accueil, la qualité,
pour tout. Ça fait partie du bonheur du théatre.
Je reviens sur ce que vous avez évoqué avec les jeunes.
N’y a-t-il pas dans le spectacle des scènes qui sont un peu vieilli
? Par exemple la bobonne qui épluche les légumes ne fait-elle
pas partie des images d’Epinal ?
Eliane Boeri : Non à en croire les rires chaque soir. Bien
sûr c’est une caricature car nous avions envie de mettre l’accent
sur ça. Sociologiquement on sait que le couple est un peu différent
aujourd’hui mais si peu. Dans les années 80, 17% des mecs entraient
dans la cuisine et aujourd’hui il y en a 20%. 3% en 20 ans ça
vaut le coup d’enfoncer le clou. Et les mœurs ont changé
au début de la vie du couple c’est-à-dire que les mecs
sont plus concernés quand ils fondent un foyer jusqu’à
ce que leur carrière démarre. Si leur carrière démarre,
ils sacrifient leur famille. Et la femme reste avec les enfants, la famille
et tout à gérer.
Et à 35 ans, ils vivent ce que l’on vivait quand on a créé
les Jeanne. Les mecs ont autre chose à faire que la vaisselle. Et nous
aussi d’ailleurs. Ce qui nous empêche pas de la faire.
Bénédicte Capiat : Par un concours de circonstances
quand on a démarré, pleins d’articles sont parus dans
Figaro Madame, Elle et Marie Claire, presse qui ne s’adresse pas aux
classes moyennes, faisaient le même constat. C’est la femme qui
reste à la maison quand les enfants sont malades, c’est la femme
qui met un bémol à sa carrière…Ça nous a
fait sourire. Il y avait même une interview d’Axelle Red, chanteuse
trentenaire, qui milite dans ses chansons pour la parité, contre la
violence envers les femmes.
Eliane Boeri : Au niveau de la France, les choses ont un peu changé,
mais au niveau mondial, et on va vers la mondialisation, on ne peut pas dire
que le sort des femmes est enviable.
Si le fond n’a pas changé, cela ne se décline-t-il
pas aujourd’hui de manière différente ? Comme par exemple
le port du voile ?
Eliane Boeri : Sauf que la phrase Tu veux peut être que je
porte le voile ? date de 1980. 20 ans c’est tellement peu pour changer
les mœurs. Par exemple, le sketch sur la femme du président de
la République, on l’avait écrit pour Danièle Mitterand
et il va tellement bien à Bernadette Chirac. Les femmes restent des
porte-serviettes. Il n’y a pas de femmes en politique… à
part Roselyne Bachelot…
Séverine Capiat : Ah mais enfin Roselyne Bachelot …
(NDLR : borborygme intraduisible)
Eliane Boeri : Il faut dire ça et c’est dommage. Dieu
sait que nous pensions dans les années 70 après avoir fait mai
68 que si les femmes accédaient à des postes de responsabilité
le look du monde serait un peu meilleur. Enfin ça valait le coup de
le tenter mais malheureusement on n’a pas été très
écoutées. Alors pouit pouit pouit (NDLR : traduction
libre) on en remet un petit coup.
Donc vous en avez remis un petit coup d’abord en province…
Eliane Boeri : Oui d’abord à Avignon mais pas rôdé.
Pas du tout. Je conteste ce terme avec force et violence. Je vais vous expliquer
pourquoi. J’étaye. Lorsqu’on a voulu monter le spectacle,
nous avons cherché des coproducteurs pour le faire avec nous ; on n’en
a pas trouvé. Nous avons cherché un théatre sur Paris
; on en a pas trouvé. On a cherché à tourner et les petites
villes de province, j’insiste, les petites villes de province, pas les
grandes, les petites villes de province nous ont ouvert les bras. Nous avons
pas été pour rôder le spectacle, nous les avons remercié,
ils nous ont fait confiance.
Nous avons commencé il y a un an à Avignon et ensuite nous sommes
partie un an en tournée. Nous avons été bien contentes
de trouver des villes de tournée car grâce à elles on
a pu amasser un petit pécule pour monter le spectacle à Paris
car personne ne nous a aidé. Nous sommes toute seules en face de cette
production et on se débrouille comme des grandes. Nous sommes ici au
Théatre de Ménilmontant où le directeur nous avait vues
en Avignon et nous a choisi. Voilà comment ce conte de fées
a pu être possible.
Comment expliquez-vous le fait de ne pas trouver de producteur ?
Eliane Boeri : Je me l’explique très très bien.
Je connais tous les gens qui étaient avec nous dans le passé
et qui m’ont dit Ah non. Tu vas pas reprendre ce vieux spectacle qui
ne fait plus rire personne. On s’en fout du féminisme. J’ai
eu d’abord des amis qui m’ont soutenue et m’ont prêté
un peu d’argent pour créer une petite société,
puis je suis allée voir mes copines.
C’est curieux que la raison du refus ne soit pas pécuniaire
mais fondé sur l’ancienneté du spectacle…
Eliane Boeri : Ç’est surtout le côté combat
féministe. Mais moi je ne vois pas ça comme un spectacle féministe.
D’ailleurs les féministes de l’époque ne nous appréciaient
pas et n’étaient pas copines avec nous car nous avions toujours
une façon de récupérer les mecs en leur disant soyez
avec nous. On leur disait pas de foutre le camp. Or, les féministes
des années 70 étaient très radicales et nous taxaient
de pactiser avec l’ennemi. Mais pour les hommes évidemment nous
sommes des féministes excitées car ils ne connaissent pas les
vraies féministes ! Moi, ça me fait juste rire!
Vous êtes à Paris jusqu’à fin février 2004.
Y aura-t-il une autre tournée ensuite ?
Marthe Hélène Raulin : Non mais on va faire quelques
festivals cet été.
Mais vous n’allez pas prendre un peu de repos ?
Eliane Boeri : On se reposera quand ce sera le moment.
Bénédicte Capiat (du fond des loges où elle se
prépare ): Mais on n’est pas fatiguées
Marthe Hélène Raulin : On va peut être rester
là pour un petit moment…on n’est pas fatiguées
Eliane Boeri : On est peut être à la veille de quelque
chose qui va durer. Nous sommes à Paris jusqu’à fin février
voir début avril. Et si ça marche bien on continuera
Jusqu’à quand ?
Eliane Boeri : On peut faire une saison à Paris.
Bénédicte Capiat : Jusqu’à ce que mort
s’ensuive !
Eliane Boeri : Ce qui est sûr c’est que l’on fera
une grosse tournée après. Tous ceux qui nous voulaient pas avant,
maintenant ils vont nous prendre.
Maintenant c’est vous qui choisirez ?
Eliane Boeri : Non, ce n’est pas une question de choisir…
Bénéndicte Capiat : Non, on n’est pas bégueules…
Eliane Boeri : Nous irons où les gens veulent. Mais c’est
vrai que dès que les médias en parlent, les théatres
sont moins frileux et prennent plus de risques…mais il n’y a pas
grand risque avec les Jeanne (sourires)
Marthe Hélène Raulin : Il est vrai que pendant notre
tournée on refusait du monde. On rajoutait même des dates parfois.
Vous avez tourné avec un tourneur ?
Eliane Boeri : Non, c’est une amie de ma fille, Patricia Malard,
qui est entrée dans le groupe et qui a démarché les théatres
un par un pendant un an. Ça a fédéré toute une
bande de gens enthousiastes et chaleureux, une histoire très très
belle.
Marthe Hélène Raulin : C’est vrai qu’on
a toute une équipe autour de nous, que des femmes…
Bénédicte Capiat : Isabelle Diefendhal, Patricia Laboureur
notre régisseuse qui nous poupougne toute la sainte journée,
Gisèle notre comptable, c’est vraiment le travail d’une
équipe sur scène et en dehors de la scène
Eliane Boeri : …Nicole Chiche, Brigitte Berthelot nos attachées
de presse.
Envisagez-vous d’écrire un nouveau spectacle ?
Eliane Boeri : On va voir parce que l’affaire prend une telle
tournure…Oui certainement et j’ai déjà écrit
mais ensuite la difficulté c’est de monter les spectacles. Si
l’on s’appuie sur quelque chose qui tient le choc, on est crédible
pour un autre projet. C’est le métier : on est crédible
ou on ne l’est pas. Ou on vaut quelque chose ou on vaut rien. Pour le
moment, on vaut rien, mais on vaut un bouche à oreille extraordinaire
qui contribue au succès du spectacle. Car on a fait très peu
de pub par rapport aux mammouths. Une campagne de pub coûte 1 million
de francs ce qui est impossible pour nous. En revanche, un public enthousiaste
compte beaucoup et c’est un miracle. Tous les élèves des
cours de théatre viennent aussi.
Ils vont reprendre vos sketches…
Eliane Boeri : Ça a déjà été fait.
Le spectacle a été traduit en 7 langues à l’époque
et a été joué partout en Europe. Nous sommes allés
le voir en Angleterre où il s’appelait Bloomers. C’était
une histoire incroyable.
Rétrospectivement, quel effet cela vous fait ?
Eliane Boeri : Je suis heureuse malgré tous les malheurs qui
nous sont arrivés en particulier la disparition de ma sœur qui
m’a été une douleur insupportable. Mais on sent qu’elle
est là, qu’elle nous envoie ses ondes bénéfiques,
qu’elle se marre avec nous. C’est une belle histoire, une très
belle histoire où tout le monde s’aime. Je crois que c’est
une belle aventure, l’aventure des femmes qui renaissent toujours de
leurs cendres...
L'heure tourne et Marthe Hélène essaie sa nouvelle couronne...
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