Il est souvent gênant de découvrir une œuvre créée pour exhorter la douleur, particulièrement quand elle est issue d’une rupture amoureuse. Par la force des choses, son auteur nous prend comme témoin de ses interminables lamentations, voire nous positionne comme partie prenante de cette situation éprouvante, faisant ainsi de l’œuvre un outil de vengeance.
Fort heureusement pour nous, l’auteur principal Charlie Fink a eu l’intelligence et la délicatesse de faire de son album post-rupture The First Days Of Spring, une superbe leçon d’optimisme et de renaissance.
Alors oui bien sûr, le jeune homme ne s’est pas remis à danser la gigue du jour au lendemain. Comme tout un chacun, il est passé par les étapes pénibles mais indispensables à la cicatrisation, l’amenant petit à petit vers la paix intérieure. Cette œuvre (on parlera d’"œuvre" conçue et réfléchie dans son ensemble, plutôt que d’un album enchaînant les titres de manière marketingo-aléatoire) est donc le fruit de sa résilience (ndlr : terme inventé par le psychiatre Boris Cyrulnic pour qualifier le fait de renaître de sa souffrance). Preuve en est le titre de l’album, The First Days Of Spring. Le printemps comme symbolique absolue de la renaissance.
Ceci étant dit, qu’en est-il précisément du contenu ?
Le premier titre, reprenant le nom de l’album, est une entrée en matière des plus convaincantes. Le morceau se construit en douceur, d’abord avec des percussions lourdes au loin, puis la venue d’une couche réverbée de violons, ensuite quelques notes de guitares et enfin les premières paroles "c’est le premier jour du printemps, et ma vie recommence à nouveau", voilà c’est (re)parti pour Charlie Fink. Jusqu’au final explosif, il nous berce de sa douce voix mélancolique et de ses mots emprunts d’optimisme. L’envie d’aller de l’avant se heurte encore parfois à quelques tourments résiduels sur "Our Window" et "My Broken Heart". De ce combat sont issus ces deux titres ayant en commun une grande beauté. La simplicité dominant l’un, alors que la richesse de l’orchestration domine l’autre.
Et soudain, c’est la révélation. Avec les indissociables et euphorisants "Instrumental I" et "Love Of An Orchestra", mélange de Fantasia et de comédie musicale, l’enthousiasme est à son comble. Les chœurs tout comme les envolées orchestrales, sont comme un ouragan de joie et de bonne humeur emportant tout sur son passage, auditeur compris.
L’euphorie n’était-elle qu’illusion ? Avec "Stranger", l’énergie positive retombe subitement. Retour mélancolique, alors que Charlie Fink fait un constat amer : une histoire d’un soir peut attrister plus qu’elle peut réparer. Voyage entre peine et joie, pas toujours simple de garder le cap du bonheur retrouvé.
Mais avec "Blue Skies", Fink se secoue à nouveau. Il voit les éclaircies au loin et continue d’avancer pour les rejoindre. Les chœurs présents sur le morceau semblent d’ailleurs l’y encourager. Finalement, c’est avec apaisement et philosophie que Fink conclut son œuvre. "My Door Is Always Open" démontre qu’il n’est donc pas question de ressentiments mais bien de paix retrouvée et de liberté.
The First Days Of Spring, n’est pas une complainte gênante, ni du voyeurisme forcé, mais une œuvre mature et maîtrisée dont il ressort une grande beauté. Il serait donc dommage de s’en priver.
Et détail non négligeable, les Noah and The Whale étant de grands amateurs de bon cinéma, la version deluxe de l’album propose un film de 50 minutes pour parfaire l’œuvre. |